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HISTORIENS LITTÉRAIRES DE LA FRANCE.

pourra être un peu étonné d’en trouver un tout politique vraiment, de quelques pages à peine : Comment une dynastie se fonde, et daté du 16 mars 1831. Est-ce donc par inadvertance que cet article un peu disparate s’est glissé là ? M. Magnin commet rarement d’inadvertances, et il faut bien noter ici une intention. En introduisant ce brin de politique entre des pages plus fraîches et restées plus neuves, en y oubliant, comme par mégarde, ce coin de cocarde, le critique littéraire a voulu sans doute témoigner qu’il avait sur certains points des opinions, des principes, rappeler qu’il les avait soutenus, et faire entendre qu’il s’en souvenait comme de tout le reste. C’est encore là un trait qui rentre dans ce que nous avons dit du caractère de M. Magnin, de cette nature des plus fidèles à elle-même et à ce qu’elle a une fois accepté ; il tient beaucoup en cela de ces personnages de la fin du XVIIIe siècle, qu’il connaît si bien, qu’il a pratiqués de bonne heure, et dont il a gardé plus d’une doctrine et plus d’un pli, tout en se séparant d’eux si complètement sur la question littéraire.

Dans cette diminution et ce désarroi général de la critique que nous déplorons, il est à souhaiter que des plumes comme celles de M. Magnin, si aguerries et si bien conservées, ne cessent pas de long-temps leur emploi, dussent-elles n’intervenir qu’avec choix et discrétion, en prenant leur moment. Qu’il achève sans doute et couronne son important ouvrage commencé sur les Origines du Théâtre moderne. Il y a déjà long-temps que, voyant s’accumuler les matériaux et les documens sur ces origines que chaque découverte faisait reculer sans cesse, M. Raynouard exprimait le vœu qu’un homme d’instruction et d’esprit intervînt et mît ordre à la question éparse et confuse. M. Magnin est désigné aujourd’hui pour cette tâche à laquelle il s’est préparé de longue main. Que si nous osions mêler un conseil au travers d’un travail si médité, et auprès d’un esprit par lui-même si averti, ce serait de borner à un certain moment la recherche, de clore son siége, et de se jeter à l’œuvre avec toute la richesse amassée et en s’occupant surtout à la dominer par l’idée, à la classer d’une volonté un peu impérieuse. En parlant de la sorte à un critique aussi prudent, nous savons bien que l’inconvénient possible serait vite corrigé. Une fois d’ailleurs le livre fait et paru, le peu qui a échappé en particularités et en minces détails arrive de toutes parts et rentre le plus souvent dans les cadres déjà exposés. Enfin de tels ouvrages ont toujours la seconde édition pour s’amender