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L’ÉGLISE ET LA PHILOSOPHIE.

quand nous exprimions des craintes au sujet de la doctrine et de l’intelligence du clergé. M. Clausel de Montals y tient la place de saint Paul.

L’intervention de M. l’archevêque de Paris dans les débats entre des membres de l’Université et du clergé est un fait considérable. Du premier siége épiscopal de France est partie une voix qui nous fait connaître les sentimens de l’église, ses désirs, ses projets. Dans les premiers momens ce manifeste a été, chose rare, accueilli presque par tout le monde avec faveur. L’église a sur-le-champ reconnu que cette pièce contenait toute sa pensée et n’abandonnait rien de ses prétentions. D’un autre côté dans le sein de l’Université, on a été agréablement surpris de voir que le clergé, par l’organe d’un de ses prélats, parlait enfin avec convenance et mesure, et cette satisfaction a empêché beaucoup de personnes de peser toute la gravité des Observations de M. l’archevêque. Ainsi, dans l’église, on a approuvé le fond ; dans le monde, on a loué la forme. Nous ne démentirons pas le jugement du monde, mais aussi nous sentons toute la portée de l’approbation de l’église.

M. l’archevêque de Paris a trop d’expérience il a trop de pratique des affaires et des hommes, il a trop de finesse et de goût pour accepter la moindre solidarité avec les déclamateurs grossiers qu’applaudit M. l’évêque de Chartres. L’emportement et l’injure ne sont pas dans les habitudes du savant auteur du Traité de l’administration temporelle des paroisses. En rédigeant ses Observations, il a pesé tout ce qu’il dit, calculé tout ce qu’il avance. Il a écrit avec les ménagemens et l’habileté d’un homme qui se propose de mener à bien une grande affaire. Lorsqu’on lit les premières pages de la brochure de M. l’archevêque, on serait tenté de croire qu’on a enfin rencontré un conciliateur impartial qui apporte la paix avec lui. Malheureusement cette illusion ne saurait être longue, et pour peu qu’on suive attentivement le prélat dans les déductions de sa logique, on s’aperçoit qu’au lieu d’un arbitre, on est en face d’un adversaire, et d’un adversaire intraitable sur les points fondamentaux du débat.

Nous pouvons juger quelle confiance l’église a aujourd’hui dans ses forces par la manière dont elle fait le procès à l’esprit du siècle. Voici la suite des raisonnemens par lesquels M. l’archevêque arrive à conclure que tout gouvernement civil est incapable de poser la base essentielle de l’enseignement public. La morale est indissolublement unie au dogme catholique, et ce sont seulement ceux qui sont chargés d’enseigner le dogme qui peuvent enseigner la morale.