Les Grecs n’avaient qu’une monarchie plutôt impuissante qu’absolue, un despotisme désarmé, beaucoup de dettes, et la liberté de la presse. Quel amalgame !
Certes, la nuit du 14 septembre n’a pas élevé et consolidé le trône de Grèce. L’histoire nous dit assez combien il est difficile de rendre tout son éclat, tous ses prestiges à une royauté vaincue. C’est là le côté déplorable de ces révolutions ; elles rendent souvent impossibles les résultats qu’elles se proposent d’obtenir. La royauté peut transiger avec honneur ; mais si elle a été obligée de rendre les armes, que lui restera-t-il ? Il faut alors la reconstituer en quelque sorte ; c’est une résurrection à accomplir, résurrection lente, difficile, et qui réclame tous les soins de l’homme d’état le plus consommé. Quoi qu’il en soit, et malgré les énormes difficultés de la situation, on l’a dit avec raison, et nous partageons entièrement cet avis, le roi Othon a sagement fait en souscrivant aux vœux du pays plutôt que de lui opposer la résistance passive d’une abdication. En abdiquant, il aurait, par une sorte d’égoïsme monarchique, jeté dans une étrange confusion le pays que la chrétienté lui a confié, le pays qui l’a adopté, qu’il aime sans doute, et auquel, nous l’espérons, il peut faire beaucoup de bien. Le roi Othon peut vaincre les difficultés de sa position par ses qualités personnelles, surtout par la confiance qu’inspire la loyauté de son caractère. On sait que sa parole est sacrée. La dignité de la couronne, il peut la retrouver tout entière dans l’accomplissement loyal de ses promesses et dans la fermeté avec laquelle il saura exercer sa part de pouvoir. C’est la seule voie qui lui reste. Se rétracter serait un acte de légèreté ; se croiser les bras et laisser tout aller à la dérive serait une faiblesse. Il est encore un beau rôle à jouer ; au pis-aller, il faut prouver au monde que, si un gouvernement libre et fort ne peut pas se fonder en Grèce, la faute n’en est pas à la royauté. Il sera toujours beau d’avoir essayé de préserver ce sol sacré des intrigues souterraines qui ne cessent de le miner et des passions déréglées qui peuvent d’un instant à l’autre y faire explosion.
L’affaire de notre consul à Jérusalem est honorablement terminée. Il y avait là deux questions distinctes, le droit d’arborer le pavillon et la réparation des outrages faits au consulat de France. Dans l’empire ottoman, le droit, pour les consuls, d’arborer le pavillon national ne va pas de soi ; il est réglé par les capitulations particulières à chaque nation. On sait que les Turcs commencent à peine à se placer sous l’empire du droit commun en fait de relations internationales. Dans les capitulations avec la France, le droit d’arborer le pavillon était reconnu pour les consulats français depuis long-temps établis, et le consulat de Jérusalem est une institution toute récente. Mais une convention postérieure aux capitulations accorde à la France le traitement de la nation la plus favorisée. Or, la Russie, dans les traités qu’elle a su imposer à la Porte, a stipulé pour tous ses consuls le droit d’arborer le pavillon national. En fait, cependant, il paraît qu’aucun autre consul que le consul de France n’avait encore arboré le pavillon national dans la ville sainte,