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RÉPONSE À M. L’ARCHEVÊQUE DE PARIS.

à voir dans cette déclaration la pensée formelle de toute l’église de France. Ne se trouvera-t-il pas une voix dans ces quarante mille prêtres pour s’élever contre une telle responsabilité ? Parmi tant d’évêques, de prédicateurs, d’ordres différens, ne verra-t-on personne, je le répète, personne qui ose, non à la dérobée, non dans une lettre furtive, mais franchement, ouvertement, renier cette solidarité avec les fils de Loyola ? Un silence de peur pèsera-t-il sur une déclaration qui enveloppe l’église de France dans une cause tant de fois jugée et toujours condamnée ? Nous attendons, nous écoutons.

Et pourquoi donc tant d’ardeur à se commettre pour eux ? qui vous oblige à vous charger volontairement de cet héritage de malédiction ? La reconnaissance ? mesurez d’abord le bien et le mal qu’ils vous ont fait. La nécessité ? où est-elle ? La peur ? c’est-à-dire que vous vous abandonnez pour n’avoir plus rien à craindre. Leurs promesses ? est-ce que vous pensez qu’eux seuls peuvent sauver le catholicisme ? Dans ce cas, c’est une grande nouvelle, que le monde soit mis ainsi dans la nécessité d’opter entre Voltaire ou Loyola. Si leurs promesses vous attirent, attendez au moins qu’ils aient prouvé, par des marques irréfutables, leur habileté à se ressaisir des temps nouveaux. Qui vous presse ? Le monde vous donne la paix que vous promettez sans la pouvoir tenir. Mais quoi ! à la première injonction de leur part, sans rechercher si leur alliance est funeste ou non, sans qu’ils aient réparé le dommage qu’ils vous ont fait, sans nul gage assuré, contrairement à votre propre tradition, vous identifier à eux, vous absorber en eux ! vous réfugier chez ceux-là même dont le nom suffit pour faire crouler les palais en un moment, sans qu’il en reste pierre sur pierre ! Si c’est du désintéressement, il manque de la prudence obligée même dans les choses divines ; si c’est de l’aveuglement, que l’on mesure par là ce que peuvent des hommes qui, en exerçant cette fascination, ont encore l’art de persuader qu’ils ont cessé de vivre.

Au reste, cette intime solidarité une fois admise, il faut du moins en subir la première conséquence ; elle s’applique à ces ordres divers, bénédictins, dominicains, frères mendians, etc., qui partout essaient de renaître. Aussi long-temps que ces instituts ont été réellement distincts, ils ont eu leur raison d’existence ; mais, s’il est avéré que le jésuitisme les enveloppe désormais dans un esprit plus général, de telle sorte que l’on ne peut le critiquer sans que tous ne soient atteints, pourquoi, encore une fois, tant de manteaux divers pour cacher le même personnage ? Est-il juste de cacher l’ame du jésuite