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LES ÎLES FALKLAND.

aucun droit réel, pas plus à la découverte qu’à la prise de possession et à l’occupation premières. La restitution du Port-Egmont et le désaveu de l’acte par lequel l’Angleterre en avait été temporairement dépossédée, après discussion, négociation et convention solennelle, donnèrent au titre de la Grande-Bretagne plus de stabilité et de force, car ce fut une reconnaissance virtuelle de sa validité de la part de l’Espagne. La Grande-Bretagne aurait pu alors occuper toutes les îles Falkland, y former des établissemens, en fortifier tous les ports, sans donner aucun ombrage à l’Espagne. »

Le gouvernement anglais ne devait pas tarder à profiter de cette reconnaissance de ses prétentions. Aussitôt que les États-Unis se furent désistés des réparations qu’ils avaient paru vouloir exiger, c’est-à-dire vers la fin de 1832, le commandant de l’escadre anglaise en station sur la côte du Brésil reçut l’ordre de s’assurer sans délai de la possession effective des îles Falkland. Pendant l’absence de Vernet, le gouvernement du Port-Louis avait été remis à un Français ; mais les gauchos que Vernet avait introduits dans l’île pour lui servir de garde s’étaient révoltés contre leur commandant et l’avaient tué. C’est alors que le sloop britannique la Clio entra dans la baie du Port-Louis. Il y trouva en station un petit navire de guerre argentin qui voulut résister et s’opposer à la prise de possession. Sans écouter ses représentations, le capitaine anglais lui intima l’ordre de s’éloigner, en emportant tout ce qui appartenait aux citoyens de la République Argentine. Il descendit ensuite dans l’île, hissa le pavillon britannique, et s’éloigna après l’avoir laissé à la garde d’un Irlandais qui avait été au service de Vernet ; mais à peine fut-il parti que les gauchos se défirent de cet Irlandais et de tous ceux qui voulurent arrêter leurs excès. Ce ne fut que plusieurs mois plus tard que reparurent des navires anglais qui châtièrent les coupables et prirent définitivement possession du Port-Louis et de tout le groupe des îles Falkland.

Aussitôt que le gouvernement argentin eut connaissance de cet acte arbitraire, il adressa une protestation énergique au chargé d’affaires britannique à Buenos-Ayres, contre les prétentions de la Grande-Bretagne à la propriété des îles Falkland ; il chargea en même temps son ministre à Londres, M. Moreno, de réclamer la restitution de ces îles, et de demander une réparation de l’injure et des dommages causés par cette prise de possession. Lord Palmerston ne répondit que six mois après, le 8 janvier 1834, aux communications de M. Moreno, par une note d’une étendue considérable, dans la-