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par les citoyens des États-Unis en conséquence des pouvoirs illégaux confiés à Vernet. Le ministre de la République Argentine soutint, de son côté, les droits de son gouvernement à la propriété des îles Falkland en qualité d’héritier des droits de l’Espagne. Il évita avec soin de discuter le sujet du différend, de peur d’être obligé de se prononcer sur la légalité des décrets du 10 juin 1829, et porta le débat sur la violence commise par le capitaine du Lexington, qui, dans un temps de paix, avait attaqué un établissement de la république. Il déclarait que son gouvernement était déterminé à ne pas entrer dans la discussion des points en litige jusqu’à ce qu’il eût obtenu réparation des dommages causés par ce capitaine. M. Baylies reçut en même temps un mémoire de Vernet, dans lequel toutes les questions agitées entre les deux républiques étaient longuement discutées. Il n’y fit aucune réponse, et repartit bientôt après pour les États-Unis. À son arrivée, il y eut une motion dans la chambre des représentans pour demander communication de la correspondance relative aux îles Falkland. Le président Jackson refusa d’y faire droit, sous le prétexte que la négociation n’était que suspendue. Cependant le gouvernement argentin faisait imprimer à Buenos-Ayres tous les papiers relatifs à cette affaire, et bientôt après on les vit paraître en anglais à Londres.

C’est ainsi que se termina ce différend, sans recevoir, à proprement dire, de solution. Ce qui est étrange, c’est le langage tenu par M. Baylies ; on dirait qu’il n’avait été envoyé à Buenos-Ayres que pour soutenir la note présentée deux années auparavant par M. Woodbine Parish, et préparer la voie au succès des prétentions de l’Angleterre. Avant de quitter les États-Unis, il avait eu des conférences avec le ministre britannique, M. Fox, qui l’avait mis au courant de l’état de la discussion entre la Grande-Bretagne et la République Argentine, et lui avait donné communication des pièces échangées de part et d’autre et jusque-là tenues secrètes. Dans ses notes, M. Baylies s’étendit sur l’histoire des démêlés de la Grande-Bretagne et de l’Espagne au sujet des îles Falkland, et maintint que, malgré la réserve insérée dans la déclaration de la cour de Madrid en 1771, et l’abandon du Port-Egmont en 1774, les droits de la Grande-Bretagne à la possession exclusive des îles Falkland ne pouvaient être sérieusement contestés. C’est ainsi qu’il disait : « L’acte du gouverneur de Buenos-Ayres fut désavoué par l’Espagne, le Port-Egmont fut restitué par une convention solennelle. L’Espagne réserva pourtant ses droits antérieurs ; mais cette réserve était entachée de nullité, car elle n’avait