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LES ÎLES FALKLAND.

cour de Madrid, abandonnée à ses propres forces, revint à des sentimens plus modérés et accepta la médiation de la France pour négocier un arrangement qui satisfît les deux parties en conciliant leurs prétentions réciproques.

On imagine avec quel empressement l’offre de la France fut reçue par le gouvernement anglais. Seul de tout le cabinet, lord Weymouth ne partageait pas les sentimens de modération qui animaient lord North et ses collègues. Soit qu’il cédât à l’entraînement belliqueux excité dans le pays par les adversaires du cabinet, soit plutôt qu’il ne crût pas que, dans la voie des concessions, on pût faire un pas de plus, il ne voulait pas entendre parler d’un accommodement conclu au prix d’une partie des prétentions de l’Angleterre. Jusque-là ses avis avaient été écoutés avec condescendance, et l’Angleterre lui devait d’avoir tenu dans les négociations un langage ferme et tel qu’il convenait à sa dignité ; mais, devant la médiation inattendue de la France et en présence d’un arrangement qui ne pouvait manquer de donner satisfaction à l’Angleterre, ses collègues cessèrent de le suivre : lord Weymouth se retira du cabinet, et la négociation fut remise à l’autre secrétaire d’état, lord Rochford.

Le ministère anglais avait un trop grand intérêt à se présenter devant le parlement avec une solution définitive pour se montrer difficile. Aussi, quelques heures avant la reprise de la session, après les vacances de Noël, le 22 janvier 1771, l’arrangement proposé par la France fut accepté de part et d’autre. L’ambassadeur espagnol présenta à lord Rochford une déclaration qui portait que « sa majesté catholique, dans le désir de maintenir la paix et la bonne harmonie qui régnait entre les deux puissances, désavouait l’expédition entreprise dans le mois de juin de l’année précédente contre l’établissement anglais dans les îles Falkland, et s’engageait à rétablir les choses au Port-Egmont dans l’état où elles étaient avant cette époque, à restituer le fort avec tout ce qui y avait été saisi, mais à la condition que cette restitution n’affecterait en rien ses droits à la souveraineté des îles Falkland. » De son côté, lord Rochford présenta au prince de Maserano une contre-déclaration dans laquelle, sans faire aucune mention de la réserve insérée dans la pièce précédente, il récapitulait tous les points qui y avaient été touchés, et terminait en reconnaissant, au nom de son souverain, que cette déclaration était une réparation suffisante de l’injure faite à la Grande-Bretagne. Ces deux pièces n’étaient séparées qu’en apparence ; c’était en réalité une convention discutée et acceptée par les deux parties. Elles furent communiquées au par-