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telots, l’un âgé de dix-huit ans et l’autre de vingt-quatre, qui furent recueillis par le gouverneur actuel de l’établissement anglais dans une exploration le long des côtes. Ces matelots s’étaient échappés d’un baleinier américain, et avaient vécu, pendant plus d’une année, sans abri et de la chair crue des oiseaux, des phoques qu’ils surprenaient, de racines et de baies ; ils étaient dans un parfait état de santé, et n’avaient en aucune façon souffert du froid ni des intempéries des saisons.

Ces îles sont entièrement dépourvues d’arbres et de toutes les plantes qui servent à la nourriture de l’homme. Les seuls végétaux dont il soit possible de tirer parti sont une espèce d’arbousier dont le fruit a le goût de la châtaigne, l’ache sauvage, le céleri, l’oxalide à fleurs blanches, le bacharis de Magellanie, le bolax gommifère, et une espèce de myrte dont les feuilles tiennent lieu du thé sans trop de désavantage. En revanche, le sol des îles Falkland est couvert d’excellens pâturages, qui fournissent abondamment à la nourriture des troupeaux de chevaux et de bœufs, aux cochons et aux lapins, qui y ont été transportés par les premiers colons, et qui s’y sont multipliés au-delà de toute expression. Qu’on se figure d’immenses prairies que l’on dirait tondues au ciseau, tant elles sont unies ; pas une plante ne s’élève au-dessus des autres ; elles se pressent, s’entrelacent ; les fleurs se cachent sous les feuilles, comme pour se dérober à l’impétuosité du vent, et toutes ces herbes à petits rameaux, à feuilles plus petites encore, forment un lacis serré et impénétrable. Les cent vingt espèces environ dont se compose la flore des îles Falkland offrent un grand intérêt au botaniste. Les gramens y dominent et y présentent des caractères particuliers ; ils croissent dans les terrains les plus ingrats et semblent se plaire aux exhalaisons marines. Mais c’est dans les îlots qu’il faut admirer les développemens énormes d’une plante de ce genre, le fétuque en éventail, à port de palmier, dont les épais fourrés protègent les phoques à l’époque de leurs amours, et servent de retraites aux manchots qui y vivent en république.

Les nombreuses tribus des oiseaux de mer couvrent les plages et les roches escarpées ; dans les étangs et les cours d’eau douce pullulent les espèces palmipèdes les plus communes ; les animaux amphibies, les phoques, les loutres, etc., cherchent en foule une retraite sur le sable et dans les anfractuosités des rochers ; les oiseaux terrestres, quoiqu’en petit nombre, ne manquent pas non plus aux îles Falkland. Mais jusqu’à ce jour aucune bête venimeuse, aucun