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que les revenus de ce pays soient appelés à contribuer au budget pour une certaine somme, afin de remédier au mal immense et croissant du déficit. » Mais sir Robert Peel attendait plus encore de la taxe des revenus ; il voulait s’en servir pour alléger les souffrances des intérêts industriels et commerciaux. « Je fais appel aux revenus, ajoutait-il, non-seulement pour suppléer au déficit, mais pour me mettre à même d’accomplir de grandes réformes commerciales qui puissent ranimer le commerce et apporter aux intérêts manufacturiers des soulagemens dont les heureux effets réagiront sur tous les autres intérêts du pays. »

La réforme que le premier ministre annonçait était la révision générale des tarifs. Le déficit comblé, sir Robert Peel se promettait de l’income tax un surplus de trente millions de francs environ ; il voulait en faire profiter les intérêts industriels, en combinant les diverses réductions de droits de manière à dégrever d’une somme égale le montant des impôts indirects. Nous ne reviendrons pas sur les détails de cette grande mesure financière, qui d’ailleurs ont été exposés et discutés ici avec soin dans des travaux spéciaux ; il suffit d’en rappeler les dispositions générales : lever les prohibitions et diminuer les droits de nature prohibitive, sur les matières premières n’en plus laisser aucun au-dessus de 5 pour 100 de la valeur, fixer la limite extrême sur les articles demi-manufacturés à 10 ou 12 pour 100, et à 20 sur les marchandises entièrement manufacturées ; abaisser en même temps les droits et sur les produits coloniaux et sur les articles étrangers similaires de ces produits ; enfin abolir tout droit d’exportation sur les manufactures anglaises[1] : telles furent les lignes principales du plan de sir Robert Peel. Il croyait même, grace à ces combinaisons nouvelles, pouvoir produire dans les frais de la consommation de l’Angleterre une diminution suffisante pour faire regagner aux fortunes soumises à l’income tax la valeur de leur contingent dans cet impôt. S’il faut aujourd’hui l’en croire, l’expérience n’aurait pas démenti sur ce point ses prévisions. « J’ai recueilli des informations diverses, disait-il naguère[2], auprès de personnes possédant de grands ou de petits revenus : elles s’accordent à reconnaître qu’en apportant à leurs dépenses une attention convenable, elles ont pu, par suite de la diminution des prix sur

  1. La conséquence la plus importante de cette abolition était la liberté accordée à l’exportation des machines anglaises, les machines à filer ou à tisser le lin exceptées néanmoins.
  2. Séance de la chambre des communes du 8 mai 1843, discussion du budget.