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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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31 juillet 1843.


Les dernières nouvelles d’Espagne paraissent décisives. Zurbano a perdu son armée ; Seoane, fait prisonnier, a obtenu des passeports pour la France ; Mendizabal a dû quitter Madrid, qui s’est rendu sans condition aux généraux de la coalition. Le ministère Lopez est installé comme gouvernement provisoire. La garde nationale, désarmée en quelques heures, sans résistance aucune, vient d’être réorganisée par Cortina. Aucune persécution n’a déshonoré ce nouveau gouvernement. On se plaît à montrer que ce n’est pas là le triomphe d’un parti ; c’est le pays qui a désarmé une faction usurpatrice et violente.

Espartero et ses conseillers doivent être fort déconcertés de la reddition de Madrid. Si nous sommes bien informés, Espartero ne désespérait pas de sa situation, lorsqu’il comptait encore sur la résistance de Madrid, et qu’il prenait au sérieux les fanfaronnades de quelques miliciens et l’agitation impuissante de Mendizabal. Ces illusions ont dû promptement se dissiper. Mais on ajoute que, même en perdant la capitale, Espartero se flattait de pouvoir prolonger la lutte dans l’Andalousie. C’est l’Andalousie, aurait-il dit, qui sera alors la patrie. Quelle chimère ! Seulement, si le mot est vrai, on pourrait en conclure que les ayacuchos auraient eu en effet la pensée d’enlever la reine et de la conduire à Cadix ; car il eût été par trop stupide d’imaginer que l’Espagne verrait la patrie se résumer dans les personnes d’Espartero, de Mendizabal et de Linage.

Il ne reste à Espartero qu’un coup de désespoir ou l’émigration. Le moment des résolutions nobles et dignes est passé sans retour pour lui. Se démettre de la régence aujourd’hui que de fait il l’a déjà perdue, ce ne serait plus qu’une démarche ridicule. Abuser de la fidélité et du dévouement de quelques hommes pour livrer des combats, brûler des villes et prolonger la guerre civile,