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l’extrait de l’acte soit remis, dans la quinzaine de sa date, au greffe du tribunal de commerce de l’arrondissement dans lequel est établi le siége social, pour être transcrit sur le registre et affiché pendant trois mois dans la salle des audiences. Si la société a plusieurs maisons de commerce situées dans divers arrondissemens, la remise, la transcription et l’affiche de cet extrait doivent être faites au tribunal de commerce de chaque arrondissement. L’extrait doit contenir (art. 43) les noms, prénoms, qualités et demeures des associés autres que les actionnaires ou commanditaires, la raison de commerce de la société, la désignation de ceux des associés autorisés à gérer, administrer et signer pour la société, le montant des valeurs fournies par actions ou en commandite, l’époque où la société doit commencer et celle où elle doit finir. Mêmes formalités lorsque la société est continuée après le terme fixé pour sa durée, lorsqu’elle est dissoute avant le temps, lorsqu’un ou plusieurs des associés se retirent, lorsque de nouvelles clauses ou stipulations sont introduites dans l’acte, ou enfin lorsqu’il est changé quelque chose à la raison sociale. Et, afin que ces formalités soient observées dans leur rigueur, le législateur a cru devoir les sanctionner par la plus inévitable, mais non pas la plus morale des peines, celle de la nullité de l’acte à l’égard des intéressés, sans préjudice des droits des tiers.

Ne nous appesantissons pas sur l’abus de ces formalités et sur la gêne qu’elles engendrent, gêne trop réelle, quoique l’habitude en fasse moins sentir le poids ; mais remarquons, en passant, cette longue et fastidieuse publicité qu’on impose aux sociétés commerciales. Qu’est-ce d’ailleurs qu’une convention dont les termes doivent rester exposés aux regards du public pendant trois mois ? Trois mois ; on en demande beaucoup moins pour la publication des bans de mariage. Après avoir affiché leur union commerciale pendant un temps si long, les associés ne peuvent guère songer à se séparer dans un terme prochain. Il faut bien que la durée présumable de l’association corresponde à celle de la publicité qu’elle a reçue, et une publicité de trois mois suppose au moins dix ou vingt ans d’union commerciale. Est-ce bien au commerce que l’on peut songer à imposer de telles obligations ? Le commerce, dont la mobilité est l’essence, peut-il se prêter sans effort à des unions ainsi réglées, et n’est-ce pas le violenter dans son esprit que l’assujettir à de semblables lois ?

Ces précautions sont nécessaires, dira-t-on, pour garantir les droits des tiers. Si elles sont nécessaires, comment donc l’Angleterre s’en est-elle passée jusqu’aujourd’hui ? car dans ce pays les associations se contractent sans aucune des formalités obligatoires parmi nous. Si elles sont nécessaires, pourquoi le code français lui-même en exempte-t-il les sociétés en participation ? On sait que ces sociétés ne sont sujettes (art. 50) à aucune des formalités prescrites pour les autres, et qu’elles peuvent être constatées (art. 49) par la représentation des livres ou de la correspondance, et même par la preuve testimoniale. Pourquoi cet abandon partiel d’un système de garanties qui paraît si nécessaire ? C’est, dira-t-on, qu’il serait impraticable pour des