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DES SOCIÉTÉS COMMERCIALES.

Cette loi de 1807 a subsisté sans altération jusqu’à nos jours : c’est dans ses dispositions et ses tendances qu’il faut chercher la cause de l’état de torpeur où l’association languit parmi nous, aussi bien que des abus et des scandales qui ont suivi ses trop rares applications. — On peut la résumer ainsi : la loi reconnaît trois espèces de sociétés commerciales, la société en nom collectif, la société en commandite, et la société anonyme.

Dans la société en nom collectif, tous les associés doivent être nominalement désignés dans un acte rendu public, et leurs noms peuvent seuls faire partie de la raison sociale. Ils sont d’ailleurs unis par les liens d’une étroite solidarité, chacun étant indéfiniment responsable, sur sa personne et sur ses biens, de tous les engagemens contractés par la société, et les engagemens sociaux pouvant être contractés par chacun d’eux, pourvu qu’il ait signé sous la raison sociale.

La société en commandite se contracte entre un ou plusieurs associés responsables et solidaires, et un ou plusieurs associés simples bailleurs de fonds, que l’on nomme commanditaires ou associés en commandite. Les noms des associés responsables et solidaires figurent seuls dans l’acte de société, et seuls aussi peuvent faire partie de la raison sociale. La gestion leur est exclusivement réservée. Par rapport à eux, la société entraîne tous les effets de la société en nom collectif ; quant aux associés commanditaires, ils ne sont passibles des pertes que jusqu’à concurrence des fonds qu’ils ont mis ou dû mettre dans la société.

La société anonyme n’existe point sous une raison sociale ; elle n’est désignée sous le nom d’aucun des associés ; elle est qualifiée par la désignation de l’objet de l’entreprise. Tous les associés indistinctement y jouissent de l’avantage de n’être engagés que jusqu’à concurrence de leur mise convenue. Elle est administrée par des mandataires à temps, révocables, associés ou non associés, salariés ou gratuits, qui ne contractent, à raison de leur gestion, aucune obligation personnelle ni solidaire relativement aux engagemens de la société, et qui ne sont responsables que de l’exécution du mandat qu’ils ont reçu.

C’est ainsi et à peu près dans ces termes que le code règle l’association commerciale. Dans cette analyse sommaire, nous omettons à dessein certaines dispositions qui complètent le système, mais qui ne semblent pas fondamentales.

En interprétant ces dispositions générales et en les éclairant de ce qui se passe dans la pratique, on peut voir que la société en nom collectif est à la fois une association de capitaux et de personnes, et même, s’il est possible, quelque chose de plus. C’est l’expression, sinon la plus rationnelle, comme on l’a dit, au moins la plus absolue de l’association commerciale. Ce qui la rend telle, c’est moins la responsabilité solidaire encourue par ses membres que l’obligation qui leur est imposée d’unir leurs noms dans une publicité commune. La société anonyme, qui semble placée à l’autre extrémité de l’échelle, nous offre au contraire l’image d’une simple association de capi-