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REVUE. — CHRONIQUE.

les critiques purement classiques sont restés bien courts sur ces matières, et il n’a d’autre parti à prendre, le plus souvent, que de les contredire et de les réfuter. Le lien qui unit la forme lyrique de notre temps à celle du XVIe siècle, et moyennant lequel le style poétique de plus d’un de nos contemporains s’apparente réellement à celui de Régnier et des vieux maîtres, a été suffisamment indiqué et démontré en mainte occasion. Mais, en venant ajouter à cet ensemble d’études et de vues ses indications nombreuses, à la fois agréables et précises, le livre de M. Viollet-le-Duc achève d’éclairer et comme de meubler tout ce fond, long-temps vague et obscur, de notre renaissance. L’auteur, par quelques lignes pleines de grace et de fine malice, a raison de se rendre à lui-même, en finissant, ce témoignage que dans sa tâche, plus méritoire pourtant qu’il ne veut bien le dire, il a réussi comme il l’entendait ; en se livrant, non sans complaisance, aux douceurs presque paternelles de la propriété, il aura servi d’une manière durable la littérature.


S.-B.


M. Cousin, qui a fait, il y a quelques mois une si heureuse excursion dans le domaine de la littérature proprement dite par la publication de son Rapport à l’Académie française sur les Pensées de Pascal, vient de réunir en un volume, sous le titre de Fragmens littéraires[1], quelques discours prononcés par lui dans des occasions solennelles, des articles déjà publiés dans la Revue des Deux Mondes, et des recherches inédites sur des points importans d’histoire littéraire. L’éloge de Fourier ouvre dignement ce nouveau recueil, et c’est une heureuse pensée d’y avoir joint les courtes et éloquentes paroles que, comme directeur de l’école normale ou comme ministre de l’instruction publique, M. Cousin a été appelé, dans ces dernières années, à prononcer sur des tombes illustres, depuis les humbles funérailles de Farcy, élève de l’école normale, tué sur la brèche en juillet 1830, jusqu’à MM. Laromiguière, Poisson, Jouffroy, de Gérando. Les efforts tentés récemment par une compagnie célèbre pour reconquérir le monopole de l’enseignement, malgré les lois de l’état qui l’ont proscrite, donnent un intérêt tout particulier à un discours prononcé dans la chambre des pairs, le 26 décembre 1838, sur la renaissance de la domination ecclésiastique. M. Cousin y signalait un danger, faible encore, disait-il, mais qui, s’il n’était promptement conjuré et dissipé, pourrait devenir menaçant pour la tranquillité publique. Dans les premières années qui suivirent la révolution de juillet, les membres du clergé, renfermés tout entiers dans leurs saintes fonctions, dociles envers l’autorité, charitables envers le peuple, ne songeaient pas à ramener cette domination intolérante qui avait été déjà si fatale aux véritables intérêts de la religion. Les bienfaits du gouvernement ranimèrent parmi

  1. Un vol. in-8o, chez Didier, quai des Augustins, 35.