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REVUE. — CHRONIQUE.

épargné les coups d’épingles. Le bruit d’une modification du ministère s’est renouvelé ces jours-ci. L’expérience a prouvé plus d’une fois que ces transformations partielles sont plus difficiles que ne le pensent les nouvellistes. Quoi qu’il en soit, les partis s’ajournent à la session prochaine : la législation et la politique y apporteront chacune un lot considérable, de grandes et capitales questions. La session actuelle laissera à la session prochaine, entre autres, les lois sur la réforme des prisons, sur l’organisation du conseil d’état, sur le recrutement de l’armée, sur les patentes, et plusieurs lois sur les chemins de fer. Nous ne parlons pas du projet sur les ministres d’état ; ce n’est peut-être qu’un enfant mort-né.

D’ici à la session prochaine, le cabinet a plus d’une question délicate à résoudre ; il aura aussi à dire à la chambre ce qu’il aura pu faire relativement au droit de visite. En fait de projets de lois, celui qui doit le plus attirer l’attention du cabinet, c’est la loi de l’instruction secondaire. Ce sera là probablement un des grands débats de la session.



Sous le titre modeste de Catalogue des livres composant la bibliothèque poétique de M. Viollet-le-Duc[1], le possesseur spirituel et érudit de cette bibliothèque vient de publier un curieux volume d’histoire et de biographie littéraire encore plus que de bibliographie. M. Viollet-le-Duc, qui dans sa jeunesse s’est essayé contre l’école alors régnante de Delille par un petit Art poétique qui parut une satire hardie, a depuis pris place parmi les érudits en vieille littérature par une très bonne édition de Mathurin Régnier (1822) ; il y mit en tête, comme introduction, une histoire de la satire en France. M. Viollet-le-Duc y signalait dès-lors à l’attention bon nombre de poètes distingués et originaux du XVIe siècle, tels que d’Aubigné ; il excita plus tard et favorisa, l’un des premiers, les travaux qui ont été poussés de ce côté par plusieurs d’entre nous. La collection riche et complète qu’il avait su rassembler des poètes de cette époque et de la suivante, dans un temps où la plupart étaient à peine connus de nom par les littérateurs même instruits, fournissait une base essentielle à une histoire de la poésie, et était déjà une partie de cette étude. Dans l’ouvrage qu’il publie aujourd’hui, l’auteur, en décrivant à la manière des bibliographes sa collection précieuse, trouve surtout dans ce travail un prétexte à des renseignemens biographiques, à des appréciations littéraires, à des citations. Bien citer, quand il s’agit de ces vieux poètes, c’est les faire apprécier de la meilleure manière, c’est déjà les juger soi-même avec sagacité et discernement. Le goût de M. Viollet-le-Duc n’est point en défaut à cet égard. S’agit-il de Louise Labé ? il extrait d’un fonds

  1. Chez Hachette, rue Pierre-Sarrasin, 12.