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raître à Mâcon. On dit que cette feuille paraît sous les auspices de M. de Lamartine, et qu’elle peut ainsi mieux que toute autre faire connaître à la France la pensée politique de l’illustre orateur. Quoi qu’il en soit, la feuille de Mâcon a pris soin d’instruire ses lecteurs des motifs qui l’ont déterminée à se placer dans les rangs de l’opposition. Laissons les lieux communs et quelques phrases banales sur les lois de septembre et l’attitude générale de notre gouvernement. Les autres motifs d’opposition, les voici : la loi de régence. Que lors du débat on ait adopté sur la question de la régence un système contraire au système que le gouvernement proposait, nous le concevons facilement, et nous sommes loin d’en faire un reproche à l’opposition ; c’était son droit. Il nous est moins facile de comprendre que, la question ayant été résolue par les chambres, on prenne cette loi pour motif d’opposition en 1843. C’est trop ou trop peu. Autre motif : en 1831, Casimir Périer, M. Thiers et quelques autres hommes de gouvernement opinèrent en faveur de l’hérédité de la pairie. À la vérité, cette hérédité fut abolie, et depuis lors oncques il ne fut question dans les chambres de pairie héréditaire ; à la vérité, il est notoire, il est certain, à Mâcon comme à Paris, que nul ne songe à proposer aux chambres l’abrogation de l’article 23 de la charte ; c’est égal, quelques discours de 1831 sont un motif d’opposition en 1843. Dans quels rangs avez-vous donc milité de 1831 à 1843 ? Le dernier motif n’est pas moins curieux : les fortifications de Paris. Mais si nous avons bonne mémoire, la question des fortifications a été emportée contre une masse assez considérable de conservateurs par le secours de la grande majorité de l’opposition. Nous le rappelons à l’honneur de l’opposition, c’est essentiellement par son concours que cette grande entreprise a été votée et qu’elle sera bientôt achevée. En votant les fortifications de Paris, l’opposition a prouvé que rien ne lui coûtait pour assurer l’indépendance nationale, et qu’elle pouvait tout sacrifier à ce grand intérêt, même ses antipathies politiques contre le cabinet qui proposait la mesure. En votant les fortifications, l’opposition, qu’on accuse d’humeur belliqueuse, a plus fait pour la paix du monde dans un jour que ne feront pendant toute leur vie ceux qui lui reprochent cette grande et patriotique résolution. Dès-lors, n’est-il pas singulier que ceux qui ne voulaient pas des fortifications de Paris trouvent dans ces fortifications un motif de passer à l’opposition qui les a votées ? Ce n’est donc pas à l’opposition que nous connaissons qu’ils passent, à la grande opposition qui a pour chef M. Barrot, mais à une petite opposition sans chef, sans organisation. Soit.

La feuille de Mâcon a eu une bonne fortune ; ç’a été de pouvoir, dans son premier numéro, donner le discours que M. de Lamartine avait prononcé dans le conseil-général de Saône-et-Loire en faveur de la réforme électorale. Il est certes heureux pour un journal de pouvoir le premier ouvrir ses colonnes à la parole toujours éloquente, souvent magnifique, du député de Mâcon ; mais, pour le fond, qu’y avait-il là de neuf, d’intéressant pour le pays ? La question elle-même ? Elle est bien rebattue. Le débat qu’on soulève ? Mais ce débat n’est nulle part dans le pays ; il n’existe qu’à Mâcon, dans le