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LE MOIS DE MAI À LONDRES.

à notre rue Saint-Honoré. La grande artère de Regent-Street, qui tombe en ligne presque perpendiculaire sur le Strand, a beaucoup de rapports avec la rue de Richelieu. L’immense Oxford-Street, avec son prolongement d’Holborn, rappelle les boulevards. Piccadilly, qui conduit à Hyde-Park, le long de Green-Park, est dans une direction analogue à celle de la rue de Rivoli. La situation d’Hyde-Park ressemble beaucoup à celle des Champs-Élysées, et les deux parcs unis de Saint-James et de Green-Park représentent assez bien la position du jardin des Tuileries. Le rapport est d’autant plus grand, que le palais de la reine, Buckingham-Palace, donne sur Saint-James’s-Park, comme le palais des Tuileries sur le jardin. Seulement la Tamise, au lieu de se prolonger en ligne à peu près droite, comme la Seine à Paris, le long des parcs, fait tout à coup un brusque retour vers le sud ; le nouvel espace compris entre les parcs et le fleuve contient le bourg de Westminster, comme si la Seine, prenant la direction de la rue du Bac, avait laissé sur sa rive nord, entre elle et les Tuileries, une portion considérable du faubourg Saint-Germain.

Cette différence dans la direction des deux fleuves suffit pour changer entièrement la physionomie de cette partie importante des deux capitales. Le principe de formation est pourtant, dans les deux cas, identiquement le même. Dans l’une et l’autre ville, le palais de la royauté était primitivement hors des murs, entouré de jardins, et quand le nombre des habitans s’est accru, quand le goût d’une vie moins pressée s’est répandu parmi eux, quand cette population riche et brillante des capitales est venue s’ajouter à la population active et industrieuse de l’antique cité, la foule des constructions nouvelles s’est portée vers la demeure des rois, et n’a pas tardé à l’entourer de son flot toujours croissant. Ce débordement de maisons a suivi naturellement les grandes lignes qui lui étaient tracées par les anciennes routes ; en cherchant toujours l’air et la lumière, la ville s’est portée de plus en plus au dehors. De vastes espaces sont restés encore vides au milieu, comme le parc de Saint-James et les Tuileries, comme les Champs-Élysées et Hyde-Park ; mais ce reste de campagne est pressé de toutes parts par les nouveaux quartiers. Il n’y a pas jusqu’au parc du Régent, situé à l’extrémité nord-ouest de Londres, qui n’ait à Paris son analogue en petit : c’est le parc de Mousseaux. Westminster seul nous manque, mais Westminster et ce qu’il renferme manquent aussi bien dans l’histoire politique de la France que dans l’histoire du développement de Paris.

Le dessin de Londres est donc au fond le même que celui de Pa-