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lité théologique des mouvemens et des cris de passion qui entraînent le lecteur et le font tressaillir. Saint Augustin n’était pas assez convaincu ! Mais sa conversion vient se mettre dans l’histoire à côté de celle de saint Paul, et elle a contribué à convertir le monde. Enfin nous entendons peu comment l’évêque d’Hyppone serait plus infatigable que fort, car d’ordinaire c’est parce qu’on est fort qu’on se trouve infatigable. Entre les premiers siècles de l’église et les temps modernes, entre l’esprit oriental et le génie de l’Occident, saint Augustin, comme un autre Atlas, porte et soutient tout le christianisme. C’est à lui qu’aboutissent les pères des premiers siècles de l’église, et c’est de lui que procèdent les grands hommes qui dans les temps modernes ont été la gloire du christianisme, saint Thomas, Luther, Calvin et Bossuet. Nous ignorons si Mme de Belgiojoso avait résolu d’avance de trouver une victime parmi les pères de l’église, mais le choix a été malheureux. Il est des colosses contre lesquels il n’est permis à personne, pas même à une femme, de lever la main.

Par une sorte de compensation, il est un hérésiarque qui a été traité par Mme de Belgiojoso avec une faveur toute particulière : c’est Nestorius. L’union de la nature divine et de la nature humaine en Jésus-Christ fut, pendant les premiers siècles de l’église, l’objet d’explications et d’hérésies sans cesse renaissantes. C’était le travail de beaucoup d’esprits de chercher à ce divin mystère une interprétation rationnelle. Arius avait reconnu l’union du Verbe avec la nature humaine, mais il niait sa consubstantialité avec le père. Le fils est consubstantiel au père, avait dit Apollinaire, mais quand il est venu sur la terre, il s’est uni au corps humain sans avoir une ame humaine ; cette ame aurait été inutile, puisque le Verbe en tenait lieu et en faisait les fonctions. Pour combattre Apollinaire, on imagina une autre doctrine. Plusieurs soutinrent que non-seulement Jésus-Christ avait une ame humaine, mais ils distinguent cette ame du Verbe. Selon eux, le Verbe habitait dans l’homme, comme dans un temple, vivant avec l’ame humaine dans une sorte d’union qui n’était pas la confusion complète, qui n’était pas l’identité. Nestorius fut le plus célèbre entre les chrétiens qui répandirent cette doctrine dont les conséquences étaient considérables. En effet, en niant l’union hypostatique du Verbe avec la nature humaine, on arrivait à conclure que la Vierge n’était plus la mère de Dieu, mais seulement la mère du Christ. Nestorius ne craignait pas d’accuser ceux qui ne pensaient pas comme lui de renouveler la folie des païens, qui donnaient des mères à leurs dieux. Entre lui et saint Cyrille, une polémique furieuse