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LE TERRITOIRE DE L’OREGON.

chasse. Aujourd’hui les Américains sont obligés d’aller acheter sur les marchés de Québec et de Montréal les fourrures et les pelleteries nécessaires à la consommation intérieure, et ils y trouvent des conditions si désavantageuses, qu’ils ont entièrement abandonné ce genre d’importations en Chine, qui, de 142,000 dollars qu’il était en 1821, est descendu graduellement à 2,368 dollars en 1840.

De la sorte, les Américains, par le fait de l’occupation de la compagnie de la baie d’Hudson, se trouvent en quelque sorte exclus du territoire de l’Oregon. C’est à peine s’il a été permis à quelques missionnaires méthodistes de s’y établir. Dispersés sur ce vaste territoire, ils ont formé çà et là des centres de culture et de défrichement qui ne demanderaient qu’un peu d’encouragement de la part du gouvernement des États-Unis pour devenir le noyau d’importantes colonies agricoles. Aujourd’hui ces intrépides apôtres de la civilisation chrétienne sont réduits à jeter dans l’esprit des Indiens qui les entourent quelques germes de christianisme. Les résultats qu’ils ont obtenus prouvent que leurs efforts pour convertir ces populations peuvent être un jour couronnés de succès. Malheureusement les Indiens semblent condamnés à disparaître bientôt de la surface du sol qui appartenait à leurs pères. L’intempérance et les maladies les déciment avec une effrayante rapidité. C’est à peine si aujourd’hui on compterait vingt mille Indiens dans tout le territoire de l’Oregon ; mais, si petit que soit ce nombre, leurs anciens exploits ont laissé dans l’esprit des Américains des sentimens de crainte et de terreur qui ne sont que trop fondés. Si les lumières du christianisme n’adoucissaient leurs mœurs féroces, ces tribus seraient encore pendant long-temps un obstacle au défrichement des contrées qui s’étendent des Montagnes Rocheuses jusqu’à la mer Pacifique. Contenus aujourd’hui par le respect qu’a su leur inspirer la compagnie de la baie d’Hudson, ils portent leurs dévastations sur les rives du haut Missouri et de l’Arkansas, et cette direction donnée aux incursions des Indiens n’est pas un des moindres motifs de la jalousie avec laquelle les Américains considèrent l’occupation du territoire de l’Oregon par une compagnie anglaise. En effet, il a toujours été dans la politique de l’Angleterre de tenir à sa disposition les tribus indiennes pour s’en faire un terrible instrument de guerre, autrefois contre les établissemens français du Mississipi et du Canada, depuis contre les États-Unis. On connaît la fameuse protestation de lord Chatham. Dans les négociations du traité de Gand, les Américains proposèrent, comme ils l’avaient déjà