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LE TERRITOIRE DE L’OREGON.

de la Columbia. Un établissement fortifié fut élevé à peu de distance de la mer, sur la rive sud de cette rivière, et reçut le nom d’Astoria. Des relations d’amitié furent aussitôt nouées avec les Indiens du voisinage ; des détachemens furent envoyés pour explorer l’intérieur du territoire et établir des postes sur tous les points importans. Dans le même temps, une expédition, forte de cent hommes éprouvés, était partie de Saint-Louis. Elle n’atteignit Astoria que dans les premiers mois de 1812, après des fatigues inouies ; elle avait traversé les Montagnes Rocheuses, institué des comptoirs d’échange, et formé des relations de bonne intelligence avec toutes les tribus indiennes qu’elle avait rencontrées.

Aussitôt que la compagnie du nord-ouest avait eu connaissance des projets d’Astor qui devaient lui causer tant de préjudice, elle avait fait partir une expédition destinée à devancer l’arrivée des Américains à l’embouchure de la Columbia ; mais cette tentative échoua. La compagnie s’adressa alors au gouvernement anglais, lui demandant d’intervenir au nom des intérêts britanniques, et il l’eût fait assurément sans la crainte de compliquer sa situation, déjà si difficile. Mais, dès que la guerre eut éclaté entre la Grande-Bretagne et les États-Unis, un navire de la compagnie du nord-ouest, suivi d’une frégate et d’un sloop envoyés par le gouvernement anglais, se présenta au commencement d’octobre 1813 devant Astoria, laissé sans défense par des malentendus et le naufrage des deux bâtimens destinés à le protéger, et le 16, l’agent à qui M. Astor avait confié la direction de cet établissement se hâta de le vendre, ainsi que les cinq postes sur la Columbia et ses affluens, avec tout ce qu’ils renfermaient, à la compagnie du sud-ouest, pour la somme de 40,000 dollars, qui ne représentaient pas la moitié de la valeur des fourrures qui y étaient entreposées. En récompense de sa trahison, il reçut une place dans la compagnie anglaise, et mit à son service tous les renseignemens qu’il possédait sur l’exploitation de cette contrée.

Au rétablissement de la paix générale, Astoria, ou plutôt le Fort-George, car les Anglais lui avaient donné ce nom, fut rendu aux Américains en vertu de l’article 1er  du traité de Gand, qui stipulait la restitution immédiate de tout territoire, places et possessions quelconques pris par l’une ou l’autre des deux puissances. Malgré les pertes énormes que la non-réussite de ses projets avait occasionnées à M. Astor, il offrit au gouvernement américain de les reprendre et d’en poursuivre l’exécution avec son concours. Cette offre ne fut pas acceptée, et, au lieu de rentrer en possession de son établisse-