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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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30 avril 1843.


Pendant que la chambre des pairs discutait les importantes questions qui se rattachent au recrutement et à la réserve de l’armée, la chambre des députés poursuivait le cours de ses travaux sans direction et de ses boutades incohérentes. La loi sur le roulage n’a traversé l’épreuve du scrutin que grace aux contradictions dont elle abonde, contradictions qui ont donné une satisfaction apparente aux vues les plus opposées. Cette conception informe aura l’étrange résultat de créer pour la première fois en France un pouvoir supérieur à celui de la loi elle-même, et d’investir des corps locaux du droit de détruire l’effet d’une prescription générale.

L’attitude du ministère durant le cours de ce débat a singulièrement frappé la chambre et l’opinion publique : il affectait de se tenir en dehors d’une discussion qu’il avait visiblement renoncé à diriger, disposé qu’il était à en accepter toutes les chances. Cette politique de résignation et d’indifférence fait chaque jour des progrès qu’il est impossible de ne pas signaler. Il ne se passe guère de séance où le ministère ne dépose sur le bureau force projets de loi, force demandes de crédits supplémentaires surtout ; puis, lorsque ces projets sont tombés dans le domaine d’une commission, le pouvoir renonce à toute intervention active, il se dégage de toute responsabilité, et laisse à la fortune et aux évènemens ce que le soin même de sa propre conservation commanderait impérieusement de leur ôter. Lorsque sir Robert Peel imposait l’income-tax aux vieilles répugnances des tories, il faisait une œuvre que tout cabinet conservateur vraiment digne de ce nom devrait au moins imiter en quelque chose. On ne fonde pas un pouvoir en se mettant à la queue de son parti, en courbant la tête devant tous les obstacles ; on n’est pas un