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LE MONDE GRÉCO-SLAVE.

teresses de Belgrad, Smederevo et Sokol, ruines féodales à ponts-levis, à portes de fer, à murs minces et très hauts, flanqués de petites tourelles rondes qui surplombent au haut des remparts comme des nids d’hirondelles, et ne résisteraient pas aux boulets. Le fort même de Sokol, réputé imprenable parce que le rocher qui le porte se cache dans les nuages, serait canonné et réduit en poudre avant une heure par des batteries placées sur les pics calcaires qui le dominent. Aussi les garnisons turques de ces châteaux, se voyant tout-à-fait à la merci des Serbes, se gardent bien de les molester.

La Serbie actuelle se divise en dix-sept nahias ou départemens, qui sont ceux de Kragouïevats, Roudnik, Chabats, Valiévo, Tchatchak, Oujitsa, Belgrad, Pojarevats, Smederevo, Tjoupria, Alexinats, et les six nouveaux districts cédés par la Turquie, c’est-à-dire la Kraïna, la Tserna-Rieka, les deux cercles de Krouchevats ou de Parakine, le Stari-Vlah et le Podrinski, ou pays de la Drina. Si l’on excepte Belgrad, peuplée d’à peu près seize mille ames, Oujitsa, qui en contient cinq mille, et Iagodina, qui paraît en avoir autant, les autres chefs-lieux n’ont pas plus de deux mille habitans. En général, les villes serbes ne sont que des amas de huttes ou de boutiques en bois, ceintes d’un talus palissadé, et qu’aucune voie régulière n’unit entre elles, car les chemins de ce pays ne sont encore que des sentiers à peine tracés par monts et vallées. Cependant la grande route d’Autriche à Constantinople passe par Iagodina, Tjoupria, Deligrad, Alexinats et Nicha, et anime ces déserts, où le mouvement de voyageurs a développé quelque industrie. Il y a en outre des chaussées peu étendues, où les voitures pourraient passer, comme celle qui va de Belgrad à Smederevo, à Chabats, et par Valiévo jusqu’en Bosnie. Quant à l’intérieur du pays, il reste encore impénétrable pour tout étranger accoutumé au comfort européen. Les rives du Danube présentent plus de facilités pour la circulation ; mais l’Autriche, qui a ouvert les nouvelles voies de communication par le Danube, est aussi la seule qui en profite, et la Serbie, n’ayant pas encore un seul bateau à vapeur, est forcée de livrer aux exploitateurs autrichiens tout ce beau littoral qui s’étend de Belgrad à Vidin, et dont la fécondité faisait dire, il y a quelques mois, à un voyageur : « On ne saurait trouver une contrée plus riche des dons de la nature, plus agréablement accidentée, plus heureusement mêlée de bois et de terres labourables, mieux arrosée, mieux partagée sous tous les rapports. Je me bornerai à citer la délicieuse vallée de l’Ipek, si mal indiquée sur