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LA FLORIDE.

de celles-ci pendent jusqu’à terre ces mousses gigantesques appelées tillantsias, qui atteignent jusqu’à quarante et cinquante pieds de long. Des quadrupèdes aux physionomies étranges, des oiseaux au brillant plumage animent ces solitudes, et s’enfuient effrayés par le bruit des pistons, par le sombre panache qui flotte au-dessus du steamer. Souvent aussi les peuplades indiennes du voisinage, attirées par l’étrangeté du spectacle, se pressent sur quelque promontoire désert. Mornes et silencieux, les guerriers caraïbes contemplent sans pouvoir cacher leur admiration la machine mugissante qui vient envahir leur antique domaine, et ces blancs dont le génie semble enfanter des monstres pour les traquer jusque dans leurs plus profondes retraites.

La ville la plus importante de la Floride est Pensacola, située à l’ouest, au fond de la baie du même nom. Son arsenal et son port militaire seront un jour de magnifiques établissemens, et aideront puissamment à assurer la domination des États-Unis dans le golfe du Mexique. Sur la côte orientale de la province, on trouve Saint-Augustin, fondée par les Espagnols en 1570. Cette antique métropole est aujourd’hui bien déchue, et son port mal abrité est presque entièrement abandonné. La capitale actuelle est Tallahassee. Fondée en 1824, dans une belle plaine à huit lieues au nord de la baie des Apalaches, cette ville ne s’est pas développée avec la rapidité miraculeuse qu’il est si fréquent d’observer dans les nouveaux établissemens des États-Unis. Elle ne compte guère que quinze cents habitans. Pourtant sa position est des plus heureuses. Les terres qui l’entourent sont d’une fertilité rare et arrosées par de nombreuses sources. De plus, elle est à la fois le siége du gouvernement central de la province et le chef-lieu d’un comté. Mais ces avantages disparaissent en grande partie devant l’insalubrité du climat. Dangereuse en tout temps pour les étrangers, l’atmosphère de cette ville devient pestilentielle pendant les mois d’août, septembre, octobre et novembre. Alors nul n’est certain d’échapper aux fièvres bilieuses qui tous les ans dévastent la contrée. Aussi, pendant cette saison meurtrière, chacun cherche à fuir le fléau. Les boutiques se ferment, les habitations sont désertes : le marchand court faire ses emplettes dans les villes du nord, et le planteur va jouir de ses richesses sur les bords du Niagara ou aux eaux de Sarratoga.

Le sol de la Floride semble composé en entier de dépôts marins ; partout on trouve des débris de coquilles mêlés au sable, au terreau, qui en forment la base. Il est probable en effet que la plus grande