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JOURNAL D’UN PRISONNIER DANS L’AFGHANISTAN.

réunie avait alors des vivres pour deux jours. Le général Elphinstone, retenu au lit par la goutte, partagea le commandement avec le brigadier Shelton. Ce dernier, désespérant de pouvoir maintenir sa position pendant l’hiver, se prononça pour une retraite immédiate sur Jellalabad. M. Mac-Naghten s’y opposa résolument, mais le mot avait été prononcé et s’était répandu, et le découragement était déjà parmi les troupes.

Le 29 novembre, Mahomed-Akbar arriva à Caboul, et désormais, sous les ordres de ce chef habile, l’insurrection s’organisa d’une manière plus régulière et plus redoutable.

Les assiégés ne pouvaient attendre du secours de l’Inde avant le printemps, et ils étaient menacés par la famine. Le peu de vivres qu’ils enlevaient dans quelques sorties ne pouvaient leur suffire longtemps. On agita dans le conseil le projet de se faire jour jusqu’au Bala-Hissar, qui était à deux milles de distance, et où on aurait pu tenir tout l’hiver ; mais, outre les risques du passage, il aurait fallu abandonner l’artillerie, peut-être les malades et les blessés. La proposition fut rejetée. Celle de la retraite sur Jellalabad était toujours énergiquement combattue par M. Mac-Naghten comme déshonorante pour les armées anglaises. Cependant l’indiscipline commençait à se répandre dans le camp, et les soldats, témoins des hésitations et des mésintelligences de leurs chefs, avaient perdu tout courage.

Ce fut alors, on était au 26 novembre, qu’un des chefs afghans fit à l’envoyé anglais les premières ouvertures d’une négociation. M. Mac-Naghten, après avoir consulté le général Elphinstone, accepta cette proposition, et le lendemain, deux députés des chefs assemblés se rendirent au camp et eurent une entrevue avec l’envoyé. On ne sait ce qui se passa dans cette conférence, mais il paraît que les Afghans firent des conditions inacceptables, car ils se retirèrent en disant : « Nous nous reverrons bientôt sur le champ de bataille. — De toutes manières, répondit l’envoyé, nous nous reverrons au jour du jugement. »

Le 7 décembre, on découvrit avec effroi que les vivres manquaient, et qu’il n’y en avait pas même pour un jour. Un détachement, envoyé à la citadelle, réussit à en ramener quelques provisions. Mais M. Mac-Naghten commençait aussi à perdre courage, et, en conservant les formes régulières de communication, il adressa au général Elphinstone une lettre publique dans laquelle il lui demandait si, dans son opinion, ils avaient une autre alternative que celle de négocier aux termes les plus favorables qu’il leur serait possible d’ob-