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POÈMES PHILOSOPHIQUES.

No I.

LA SAUVAGE.


I.

Solitudes que Dieu fit pour le Nouveau-Monde,
Forêts, vierges encor, dont la voûte profonde
A d’éternelles nuits que les brûlans soleils
N’éclairent qu’en tremblant par deux rayons vermeils,
(Car le couchant peut seul et seule peut l’aurore
Glisser obliquement aux pieds du sycomore),
Pour qui, dans l’abandon, soupirent vos cyprès ?
Pour qui sont épaissis ces joncs luisans et frais ?
Quels pas attendez-vous pour fouler vos prairies ?
De quels peuples éteints étiez-vous les patries ?
Les pieds de vos grands pins, si jeunes et si forts.
Sont-ils entrelacés sur la tête des morts ?
Et vos gémissemens sortent-ils de ces urnes