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SITUATION FINANCIÈRE DE LA FRANCE.

Et par exemple, tous les bons esprits s’accordent à penser que notre administration paperassière est mal organisée pour agir. On reconnaît que tout y devient formule et formalité, que les écritures y tiennent une place énorme, que l’impulsion ne s’y renouvelle pas, et que le contrôle réel n’y existe point. Il n’est pas moins avéré que le nombre des employés s’y trouve hors de proportion avec la masse des affaires, et qu’il serait préférable d’avoir moins d’instrumens que l’on choisirait et que l’on paierait mieux. Enfin, le gouvernement n’est plus qu’une machine, lui qui devrait surtout être un moteur. Un ministre passe trois ou quatre heures par jour à donner des signatures, autant ou même davantage à recevoir des solliciteurs. Combien lui reste-t-il de temps et de forces pour les affaires de la nation ?

Voilà donc une réforme urgente, si l’on ne veut pas que le gouvernement périsse étouffé sous des montagnes de papier. Qui mettra cependant la main à l’œuvre ? Sera-ce la chambre ? Évidemment non. Tout ce qu’elle peut faire, c’est de refuser les allocations qu’on lui demande périodiquement pour donner plus d’accroissement ou plus d’importance aux bureaux, et qui cette année encore s’élèvent, pour les divers départemens ministériels, à 4 ou 5 millions. Mais il n’y a qu’un ministre, et un ministre fort, pour porter la cognée dans cet arbre pourri.

Notre administration est comme notre agriculture. Nous employons un trop grand nombre d’hommes pour les résultats que nous obtenons. La centralisation, qui est la force, la vie même de ce pays, s’affaiblit par l’extension qu’on lui attribue et se perd dans les détails. On veut que les chefs du gouvernement, ministres, directeurs, chefs de divisions, voient tout par eux-mêmes, et l’on fait passer sous leurs yeux une telle quantité d’objets, qu’ils ne les peuvent pas discerner. En donnant plus de latitude aux agens ainsi qu’aux conseils locaux, aux maires, aux préfets, aux ingénieurs en chef, aux conseils généraux, aux conseils municipaux, on diminuerait de beaucoup cette besogne de la correspondance qui ralentit et complique les affaires ; il deviendrait possible de licencier la moitié de cette armée d’employés qui seraient plus utilement appliqués à la création ou à l’échange des produits. Mais, encore une fois, il faut un grand ministre pour entamer et pour mener à fin une telle entreprise ; et cette gloire ne paraît pas avoir tenté les puissances du jour.

En dehors de la réforme administrative, il est encore d’autres moyens de diminuer les charges du pays. Le premier, et ce n’est