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de telle ou telle administration, les dispositions de telle ou telle chambre ? Ce sont là des difficultés qui n’ont rien de radical, et dont l’expérience doit tôt ou tard triompher. Pour rétablir l’équilibre dans notre système financier, on peut tout ensemble diminuer les dépenses et augmenter les recettes. Nous allons aborder cette démonstration.

DÉPENSES.

Toutes les fois que les chambres ont voulu opérer des économies, elles l’ont fait non par des réformes qui auraient simplifié les rouages ou corrigé les abus administratifs, mais par des retranchemens qui portaient sans préparation sur les personnes ou sur les choses. On a rogné les appointemens de quelques employés, on a supprimé d’un trait de plume cinquante, soixante, et quelquefois cent mille hommes dans les rangs de l’armée active, on a désarmé des vaisseaux et congédié des matelots, on s’est abstenu de renouveler le matériel de nos arsenaux, on s’est cru plus riche du moment où l’on a cessé de pourvoir aux éventualités de l’avenir, et cependant l’on n’est pas parvenu à rencontrer cette chimère que M. Humann avait rêvée le premier, l’équilibre des budgets.

Qu’en est-il résulté ? Les nécessités, que l’on avait ajournées, se sont présentées inopinément et sous la forme la plus menaçante. Le traité du 15 juillet 1840 ne nous a pas trouvés prêts à faire respecter nos droits. En moins de six mois, il a fallu improviser une marine, une armée, un matériel de guerre, des fortifications. Pour avoir reculé, pendant cinq ans, devant une dépense annuelle de 50 à 60 millions, nous en avons eu 3 ou 400 à dépenser d’un seul coup. Nous avons largement soldé l’arriéré, sans compter l’affaiblissement auquel cette politique mesquine et sans prévoyance nous a pour long-temps condamnés.

En général, les économies qui méritent ce nom ne peuvent pas venir des chambres. Toute réforme efficace suppose un système, et l’administration est seule en mesure d’apporter dans ces changemens une vue d’ensemble, de substituer un ordre à un autre, de ne pas détruire en amendant. Les assemblées délibérantes ne doivent pas prendre, en pareil cas, d’autre initiative que celle du contrôle et du conseil ; leur liberté d’action ne s’exerce véritablement que sur les détails ; le reste étant une affaire de responsabilité, il convient de le renvoyer au gouvernement.