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LA BELGIQUE.

grandes relations personnelles du roi, que des liens de famille unissent aux souverains des deux premières monarchies de l’Occident, son intelligence profonde de la situation du pays et du caractère du peuple sur lequel il a été appelé à régner, et l’usage prudent qu’il fait de son influence entre les deux partis, dont il sera long-temps le conciliateur et l’arbitre. Enfin, pour prouver par un seul fait l’estime qui entoure le trône, nous rappellerons que dans ce pays si essentiellement religieux, après le choix d’un roi protestant, ce qu’il y a de plus remarquable sans contredit, c’est que jamais, à la tribune ni dans la presse, ni même dans le public, il n’a été fait une seule allusion à l’exercice de son culte particulier.

Le rôle du gouvernement n’est que le développement de celui de la royauté. Tous ses efforts doivent tendre et ont tendu en effet jusqu’à ce jour à favoriser la formation de l’unité nationale, à faire du royaume belge un état. Or, les différens ministères qui se sont succédé depuis le commencement du régime actuel, à quelque opinion qu’ils aient appartenu, ont eu ce but devant les yeux, et tous ayant repris l’œuvre commune au point où leurs prédécesseurs l’avaient laissée, le progrès en ce sens n’a pas souffert d’interruption. La pensée constante du gouvernement belge a été d’abord d’en finir avec les difficultés diplomatiques auxquelles l’intrusion d’un peuple nouveau dans le système européen avait donné inévitablement naissance. Quoique impuissante vis-à-vis de la conférence qui a réglé les conditions de son existence légale, la Belgique n’en est pas moins parvenue, par son obstination, à restreindre l’étendue des sacrifices au prix desquels on voulait la lui faire acheter, et ses envoyés ont surtout fait preuve d’une habileté incontestable, quand ils n’ont plus eu à compter qu’avec la Hollande. Le traité conclu entre les deux pays au commencement de cette année vient de fermer enfin la période diplomatique : la séparation des deux peuples est radicale ; on a écarté soigneusement toutes les causes possibles de collision qui auraient pu résulter de l’usage d’un fleuve international et du paiement d’une dette commune ; cette convention enfin est si avantageuse à la Belgique, qu’on a pu croire un moment que les chambres hollandaises refuseraient de la ratifier.

Toutefois le gouvernement n’avait pas attendu la solution de ces difficultés, qui n’ont pas duré moins de douze ans, pour diriger le pays dans sa nouvelle carrière. La création du réseau des chemins de fer est celui de tous ses actes qui a eu le plus de retentissement, qui a le mieux posé le nouveau royaume en Europe : nous nous y arrê-