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MŒURS ÉLECTORALES DE LA GRANDE-BRETAGNE.

de ses collègues, sir John Hobhouse. L’ancien ministre des Indes a été interrogé par la commission, et sa déposition n’est pas la moins curieuse. En voici quelques passages :

« Je déposai d’abord 5,000 liv. st. (125,000 fr.) chez un banquier ; M. Larpent s’engagea également à déposer 125,000 fr. Je payai encore ultérieurement 50,000 fr.

D. — De sorte que vous avez personnellement dépensé 7,000 liv. st. (175,000 fr.)

R. — Oui, sans compter les dépenses du compromis.

D. — Pourriez-vous nous dire ce que vous ont coûté vos élections précédentes à Nottingham ?

R. — Ma première élection m’a coûté peu de chose, environ 1,800 liv. st. (45,000 fr.) ; la seconde, celle de 1837, m’a coûté 100,000 fr.

D. — Avez-vous vu, à Nottingham, des troubles qui aient nécessité l’intervention de la force armée ?

R. — Oui. Quand j’arrivai à Nottingham, je vis beaucoup d’agitation dans la ville ; mes amis me dirent que je ne pouvais pas sortir en sûreté si je n’étais bien gardé, et ils m’empêchèrent de sortir. Quand je voulus absolument sortir, ce que je fis avec un ou deux de mes amis, je fus obligé de prendre des rues détournées et de faire le grand tour pour sauver ma vie. On m’aurait tué, si je n’avais pris ces précautions. Le jour de la nomination, une troupe d’hommes à cheval, que je sus depuis être la yeomanry, vint se ranger en ordre sur la place de la bourse, où se faisait la nomination, et où il y avait une foule compacte. Il s’engagea une véritable bataille. Il y eut aussi beaucoup de violences dans la salle où nous étions. Après la nomination, je voulus sortir avec M. Larpent pour retourner à notre hôtel, mais le maire me dit qu’il ne me laisserait pas sortir, parce que ma vie serait en danger, et qu’il avait envoyé quérir la force armée. Un escadron de dragons arriva peu de temps après : les hommes, sabre en main, se formèrent en triangle, et voulurent emmener M. Larpent et moi jusqu’à l’hôtel, mais nous refusâmes, ne voulant pas que l’on pût dire que nous ne pouvions faire cent cinquante pas dans une ville que nous avions représentée au parlement. Nous sortîmes tous les deux bras dessus bras dessous, escortés des deux côtés par nos amis et nos partisans, c’est-à-dire par des hommes qui nous protégeaient par la force de leurs bras, quelques-uns avec des bâtons, pendant que nos adversaires cherchaient à nous donner des coups par-dessus leurs têtes.