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MŒURS ÉLECTORALES DE LA GRANDE-BRETAGNE.

heure après le commencement du vote, des preuves suffisantes de corruption de la part de leurs adversaires, leur abandonnèrent la place, les laissèrent tranquillement achever leur triomphe, et suscitèrent une pétition contre leur élection à la chambre des communes. Les deux whigs, se voyant pris, transigèrent, et il se fit un compromis par suite duquel M. Larpent donna sa démission au bénéfice de M. Walter. Pour montrer avec quelle régularité se font ces sortes de marchés, nous ne pouvons faire mieux que de reproduire l’acte en bonne forme qui fut passé par les agens des deux parties. Voici ce memorandum, daté de Londres, le 4 mai 1842 :

« Il importe de régler les contestations pendantes, et il est convenu que :

« 1o  Toutes les pétitions seront retirées.

« 2o  D’ici à quatre jours, un des siéges à la chambre sera abandonné.

« 3o  La somme de 25,000 francs sera payée à MM. , etc., d’ici à sept jours, en considération des dépenses faites pour cette pétition.

« 4o  Il est entendu que M. Walter occupera le siége devenu vacant, et, comme gage de son élection, il est convenu que MM. N. et N. s’engagent à ne s’y opposer ni directement ni indirectement.

« 5o  Un billet de 4,000 liv. sterl. (100,000 fr.), signé par sir John Hobhouse et M. Larpent, sera déposé chez MM. N…… banquiers à Londres ; MM. Bacon et Sutton Sharpe décideront si les conditions ont été honorablement remplies, et, s’ils jugent qu’elles ne l’ont pas été, le billet sera remis à M. Walter. »

C’est cet acte curieux qui a formé la principale pièce d’évidence contre M. Larpent et M. Walter devant la commission d’enquête. Nottingham, qui contient environ cinq mille électeurs, et parmi eux plus d’un millier de freemen, passe pour un des bourgs les plus ouverts à la corruption et à la vénalité qui soient dans la Grande-Bretagne. On peut juger par quelques exemples jusqu’à quel point le bourg de Nottingham mérite la réputation dont il jouit ; nous prendrons ces exemples dans le rapport de la commission. Le président, M. Roebuck, interroge M. Fladgate, l’agent de M. Walter :

D. — Quels ont été les faits principaux de corruption ?

R. — On a mis en usage ce qu’on appelle à Nottingham le système de l’argent du panier (basket money), qui consiste en ceci : trois ou quatre semaines avant l’élection, les votans viennent trouver les membres actuellement en possession, ou leurs agens, pour leur demander l’argent du panier, qui est ainsi appelé parce qu’on le donne