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TENDANCES NOUVELLES DE LA CHIMIE.

racines vont pomper au loin dans le sol, que leurs feuilles dérobent à l’atmosphère ; seuls, ils fabriquent les produits fondamentaux des deux règnes. Il ne reste aux animaux qu’à s’en emparer, à se les assimiler par l’acte de la digestion.

Dans l’ensemble d’idées que nous présentons ici, la nourriture de tous les animaux, qu’ils soient herbivores ou carnivores, est absolument la même : les matières alimentaires se présentent seulement dans un état un peu différent. Elles sont disséminées en quelque sorte au milieu des tissus végétaux, et l’animal herbivore a besoin de s’ingérer une masse énorme d’alimens pour en extraire et absorber la petite quantité de matières grasses et azotées qu’ils renferment. La digestion n’a d’autre but que de dissoudre ces principes immédiats, d’en former une espèce d’émulsion. Celle-ci, reprise par les vaisseaux absorbans, versée dans le torrent de la circulation, est transportée dans tout l’organisme, et lui cède entièrement préparés les matériaux qui lui sont nécessaires. La même succession de phénomènes se reproduit chez les animaux carnassiers. Mais, les herbivores ayant déjà concentré en quelque sorte les matières alibiles, les carnivores n’auront plus besoin d’avaler une aussi grande quantité d’alimens, et ceux-ci, moins embarrassés de matières étrangères, seront plus facilement digérés. Dans cette théorie, chaque molécule d’albumine ou de fibrine fabriquée par le végétal passe, sans s’altérer, de la plante dans l’animal herbivore, de celui-ci, quand elle n’a pas été dépensée, dans l’animal carnivore : la digestion n’est plus qu’une simple absorption.

Une fois introduits dans l’économie animale, que deviennent ces divers produits ? L’expérience va nous l’apprendre. Tout animal dégage sans cesse de l’acide carbonique et de l’eau, c’est-à-dire de l’hydrogène et du carbone combinés avec de l’oxigène. En d’autres termes, les animaux brûlent continuellement du carbone et de l’hydrogène, car cette combinaison est une véritable combustion. Pour être décomposée en plusieurs temps, elle n’en est pas moins réelle. Le fer qui brûle dans l’oxigène avec une lumière éblouissante et une température des plus élevées fournit le même composé que celui qui se rouille peu à peu au contact de l’air. La quantité de chaleur produite dans les deux cas est donc absolument la même ; mais, dans le second, la lenteur de son développement la rend insensible : la réflexion et la science peuvent seules nous en dévoiler l’existence. Les combustions qui se passent dans les profondeurs de l’organisme animal sont de même nature : ce sont des combustions lentes.