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REVUE. — CHRONIQUE.

Pourquoi attendre d’eux des qualités et des sacrifices dont on ne leur donne pas l’exemple ?

Sous peu de jours, nous pourrons juger des dispositions, de l’esprit, des tendances de la chambre élective. De nouveaux députés se trouveront sur tous les bancs, et, parmi eux, il est dans toutes les opinions quelques hommes distingués et qu’on doit se féliciter de voir siéger dans la chambre. Si les électeurs n’ont pas fait justice de toutes les prétentions ridicules qui s’étalaient devant eux, ils ont en revanche accordé la palme à quelques hommes dont l’absence aurait été regrettable. Même pour les opinions que nous ne partageons pas, nous aimons à les voir représentées par des hommes sérieux, capables, honorables, et auxquels leur position et leurs antécédens imposent le respect d’eux-mêmes. Peut-être ces nouveaux élémens pourront-ils apporter dans l’assemblée, dans ses tendances, dans ses allures, des modifications qu’on est hors d’état de prévoir.

Ajoutons que la gravité et la solennité des circonstances pourront aussi contribuer à imprimer aux séances de la chambre élective une direction utile à la chose publique. Ce n’est pas autour d’un cercueil que les représentans du pays pourraient se livrer à de misérables querelles ; ce n’est pas lorsque la France leur demande de consolider l’œuvre de juillet, qu’ils pourraient perdre de vue ce but élevé et national, pour se rabaisser jusqu’à des intérêts personnels ou de coterie. La France aura les yeux fixés sur les chambres, et les chambres répondront à l’attente du pays.

Si les circonstances n’obligent pas à présenter des projets de loi dès l’ouverture même de la session, la chambre des députés ne trouvera que deux occasions de se dessiner au mois d’août, la vérification des pouvoirs et l’élection du président.

La vérification des pouvoirs nous apprendra si la majorité est pénétrée de l’importance de sa mission et de la nécessité de s’organiser dans l’intérêt du pays. Sous l’influence d’une forte et grande pensée politique, elle ne se livrera pas à de vains débats, à des chicanes n’ayant d’autre but que de manifester ses antipathies pour un homme ou pour une opinion. Si au contraire les petites passions et les petits intérêts la dominent, la vérification des pouvoirs nous offrira une suite de scènes affligeantes, et Dieu veuille qu’on ne doive pas ajouter, scandaleuses. En vérifiant les pouvoirs, une assemblée exerce une sorte de judicature. Ce qu’on attend d’elle est une appréciation à la fois équitable et ferme des cas particuliers qui sont soumis à sa décision souveraine.

La nomination du président est une question plus grave et plus décisive. Les luttes de partis se compliqueront probablement d’ambitions personnelles. Dans le même parti, j’ai presque dit dans la même coterie, il s’élèvera peut-être plus d’un candidat, et ce concours peut devenir pour le cabinet une cause très sérieuse d’embarras. Il ne serait pas difficile de désigner dès ce moment les prétendans divers. Nous aimons mieux leur laisser l’initiative de leur candidature. Espérons que la gravité des circonstances pourra exercer sur les