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les indigènes et les colons. Ne pas blesser les susceptibilités des Arabes, respecter leurs habitudes, leurs mœurs, leurs droits, ne pas leur faire sentir une supériorité de conquérans qui, pour être vieille, n’est pas moins offensante, c’est là une règle de conduite qu’il ne faudrait jamais perdre de vue, et qu’on est cependant trop souvent tenté d’oublier.


Les poésies du duc Charles d’Orléans doivent compter parmi les plus remarquables monumens de l’esprit français au XVe siècle, et une édition complète des ballades et des rondeaux du noble poète ne pouvait mieux venir qu’à une époque aussi préoccupée que la nôtre de ce qu’offre encore d’ignoré ou de mal connu la littérature du moyen âge. En publiant les Poésies du duc Charles d’Orléans, d’après le manuscrit original de la bibliothèque de Grenoble, le seul authentique et digne de quelque confiance, MM. Belin-Leprieur et Colomb de Batines ont donc rendu un vrai service, non-seulement aux érudits, mais à tous ceux pour qui l’histoire littéraire de la France est de quelque intérêt. Le classement chronologique des poésies du duc Charles, le choix des leçons, des variantes, l’exclusion des pièces dont le duc n’était pas l’auteur ; telles étaient les exigences et aussi les difficultés de la tâche qu’avaient acceptée les éditeurs. Nous croyons que leur zèle consciencieux n’a pas été au-dessous d’un semblable travail. Une notice historique de M. Champollion Figeac précède les poésies de Charles d’Orléans. Dans cette notice, divisée en trois parties, l’auteur aborde successivement la vie intérieure et politique du prince, ses ouvrages, considérés au point de vue littéraire et philologique, et l’énumération des manuscrits connus de ces poésies. Grace à l’ordre chronologique qui a présidé au classement des œuvres de Charles d’Orléans, on peut y suivre et y étudier la vie du prince depuis l’enfance jusqu’à la vieillesse. Mais l’intérêt principal qu’offrent les poésies du duc Charles, c’est assurément l’intérêt littéraire. Il y a dans plusieurs de ces petites pièces, rondeaux, ballades ou chansons, une grace et une vivacité charmantes. On y remarque surtout une délicatesse d’expression, une verve fine et spirituelle, bien rares dans les monumens de notre ancienne poésie. L’éminente position de l’auteur a laissé trace dans sa forme, et marque ses œuvres d’un cachet singulièrement original parmi les productions de son époque. Aussi notre siècle doit-il une attention particulière à ces gracieux poèmes où l’on voit poindre les qualités hautes et précieuses par lesquelles se distingua plus tard notre littérature aux meilleurs temps de sa maturité.

— Entre les plus heureux progrès qu’on puisse noter depuis douze ans, il faut assurément compter le développement des études philosophiques, l’attention qu’elles ont éveillée dans le public, la faveur avec laquelle on les a accueillies, et surtout la place importante qui leur a été accordée dans l’ensei-