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tière n’est autre chose que deux forces qui agissent l’une sur l’autre, admettre une différence d’intensité dans leur action n’est-ce pas, sous d’autres termes, admettre le vide ? Enfin, pour dernière conséquence, la théorie de M. de Rémusat le conduit tout droit à conclure l’éternité de la matière, et même sa nécessité : une telle conclusion, qu’il exprime d’une façon très explicite, mérite au moins qu’on y regarde à deux fois avant de l’admettre.

La question de l’éternité du monde et de la création pénètre ainsi dans la métaphysique de M. de Rémusat malgré lui, et Dieu y entre à la suite de la création. Quoi qu’on fasse, on ne chassera jamais Dieu de la métaphysique. Pourquoi M. de Rémusat en a-t-il eu peur ? C’est aux esprits trempés comme le sien à aborder ces problèmes ; il possède à la fois la puissance et la prudence, et ne doit craindre par conséquent ni sa faiblesse ni sa force. « Ce sont, dit-il, des problèmes qui donnent le vertige ; » mais, en philosophie, le vertige ne s’empare jamais de ceux qui savent le craindre.

Toute la philosophie de M. de Rémusat suppose Dieu et le prouve. Quand il étudie l’intelligence et qu’il explique toute notre lumière intellectuelle par la lumière de la raison, il déclare que cette lumière est empruntée, qu’elle luit en nous sans se confondre avec nous. « La raison, dit-il, peut mettre en question l’absolu, mais non pas en rendre raison, car elle n’est pas l’absolu. Elle y participe sans l’égaler, elle en émane sans s’y confondre, car il y a en elle quelque chose qui est au-delà d’elle ; elle donne plus qu’elle ne possède, et par ses limites même trahit son origine. Celui qui l’exposa sur la terre a laissé dans son berceau des marques d’une haute naissance, et quelques lettres demi-effacées de la langue qu’il parle et qu’elle ne sait pas. » Quand M. de Rémusat s’applique à rechercher la nature des corps, et que sous son analyse savante le monde corporel n’est plus que l’action de deux forces qui s’opposent l’une à l’autre, ces forces, qui ne sont après tout que des causes secondes, deviennent pour lui la preuve sans réplique qu’il existe une cause première. Ainsi, la métaphysique le conduit à Dieu par tous les chemins ; il ne lui manque que d’avoir résumé sa doctrine sur la substance infinie, et d’en avoir étudié les attributs.

Il est digne de remarque que M. de Rémusat, dans son essai sur Descartes, refuse expressément d’admettre la démonstration de l’existence de Dieu, si célèbre sous le nom de preuve à priori et d’argument de saint Anselme. Reid et l’école écossaise le rejetaient également, et jamais M. Jouffroy ne voulut consentir à y voir autre