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tout cet éclat peut ramener sur le terrain de la vérité les sectes religieuses et les sectes philosophiques qui semblaient, d’un commun accord, vouloir également s’y soustraire.

Tout serait, en effet, perdu, si la même indifférence qui se glisse peu à peu dans la vie civile, si les mêmes transactions, les mêmes accommodemens, les mêmes déguisemens où s’use la société politique, pénétraient jusque dans les plus hautes régions de l’intelligence, dans le domaine des croyances et des idées ; si là aussi le faux et le vrai avaient les mêmes couleurs, si l’on passait indifféremment de l’un à l’autre, de la gauche à la droite, de la droite à la gauche ; si, au moyen d’une sorte d’idiome parlementaire, on pouvait flatter, caresser tout ensemble le mensonge et la vérité, le bien et le mal, le ciel et l’enfer, réduisant à la fois la croyance et la science à une pure fiction, que l’on admet aujourd’hui, que l’on rejette demain, et renversant ainsi le mot de Pascal : Mensonge en-deçà des Pyrénées, mensonge au-delà, vérité nulle part ! Plutôt que d’assister à un pareil jour, nous aimons mieux encore voir se réveiller contre nous et nos amis la colère et l’anathème des tièdes.

A-t-on bien songé, cependant, à quoi l’on s’engage, quand on parle d’un enseignement strictement catholique ? Celui-là mériterait ce nom qui déduirait de la seule tradition ecclésiastique le fondement de toutes les connaissances, et détournerait, de gré ou de force, le sens de tous les faits, pour les rapporter à un système conçu, adopté d’avance, les yeux fermés, sans discussion, sans examen, sans observations. Après cela, un seul moment de liberté, d’impartialité pour la raison humaine, et tout cet échafaudage d’orthodoxie disparaît sans retour ; il ne reste qu’une opinion monstrueuse qui, affectant tout ensemble l’autorité de l’église et celle de la science, compromet la première en parodiant la seconde. Imagine qui le voudra une géologie, une physique ou une chimie sur le fondement de la légende dorée.

Dans le fond, la vieille querelle du clergé et de l’Université n’est rien autre chose que celle qui partage l’esprit humain. Le clergé, dans cette lutte, représente la croyance ; l’Université, la science ; et il faut que chacune de ces voies soit suivie jusqu’au bout, sans entraves. C’est même en se développant librement, chacune dans son domaine, que ces deux puissances peuvent un jour se rapprocher et s’unir, tandis qu’en prétendant soumettre l’une à l’autre par la seule autorité du plus fort ou du plus grand nombre, on ne fait rien en réalité que détruire l’une ou l’autre. Que serait aujour-