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LE SALON.

paraît tel ; l’atmosphère est tranquille. C’est le calme de la solitude. Sur le devant, un pâtre en appelle un autre qu’on voit dans l’éloignement à côté d’un rocher ; à l’effort qu’il fait pour crier et à l’action de sa main placée en entonnoir sur sa bouche, on sent qu’il y a loin.

On pourrait désirer plus de variété et de vigueur dans le ton général, qui est gris et triste, plus de soin dans le dessin, une exécution moins négligée ; mais ce qui est exprimé dans la peinture l’est si bien, qu’on ne s’aperçoit qu’assez tard de ce qui y manque. Cette maladresse, d’ailleurs, a quelque chose d’ingénu qui désarme. Le Verger (effet du matin), de M. Corot, est une petite vue de l’âge d’or, une charmante idylle. À droite, des rochers élevés sur le flanc desquels montent les touffes épaisses d’une abondante végétation ; au centre, à gauche, partout, aussi loin que s’étend la vue, de beaux arbres fruitiers et autres entremêlent leurs riches rameaux. C’est la campagne sous son aspect le plus riant, le séjour du bonheur, de la paix et de l’innocence.

Là ni loups ravisseurs, ni serpens, ni poisons.

Trois petites filles nues ou à peu près sont occupées à dépouiller de ses fruits un magnifique pommier. La plus hardie a grimpé sur l’arbre qu’elle tient embrassé, et, suspendue à un de ses bras, elle se penche pour donner aux deux autres les pommes qu’elle détache. La plus jeune, ou du moins la plus petite, s’exhausse sur la pointe des pieds et élève ses mains pour les saisir ; l’autre trouve plus de plaisir à les voir tomber dans sa corbeille. Ces figures sont dessinées comme il a plu à Dieu ; mais elles ont tant de grace enfantine, de naïveté et d’aimable innocence, qu’on ne peut les quereller pour quelques fautes d’orthographe. L’air circule partout ; au-dessus et au-delà des arbres, on sent l’espace. Les massifs de verdure, à droite, à demi baignés dans les vapeurs du matin, et argentés par les premiers feux du soleil levant, sont d’une finesse et d’une légèreté de tons particulièrement remarquables.

M. Corot aurait beaucoup à apprendre pour corriger les imperfections de ses ouvrages, et il n’est pas probable qu’il y réussisse, si toutefois même il y songe. Il a le sentiment délicat et naïf de la nature, une imagination poétique ; mais, avec ces rares qualités, on doit craindre qu’il ne reste en chemin. Il lui manque beaucoup de ce qui fait les trois quarts de la valeur des œuvres d’art, l’exécution.

Ces deux charmans paysages de M. Corot sont obscurément cachés,