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DU
GÉNIE DES RELIGIONS
PAR M. E. QUINET.

L’ouvrage de M. Quinet sur le Génie des Religions se préparait depuis long-temps dans sa pensée ; il est le fruit naturel de ses études et de ses préoccupations favorites. M. Quinet l’annonçait déjà en quelque sorte quand il choisissait pour son premier essai littéraire la traduction du livre de Herder sur la philosophie de l’histoire. Ahasvérus parut bientôt après, drame étrange où le pèlerin condamné à poursuivre dans une course inutile un repos qui le fuit sans cesse est l’image des destinées humaines, où tout ce qu’il y a eu de grand, cités fameuses, génies illustres, glorieuses nations, dit les lassitudes du monde. La plainte de l’humanité y est à peine adoucie par un espoir bientôt dissipé, par quelques voix de femmes qui prient et qui consolent. L’univers entier y semble évoqué pour le désespoir, et les cieux et la terre, avec leurs dieux fragiles, voués à une même fatalité, finissent par disparaître dans la nuit muette du néant. Cette œuvre d’un doute universel, enivré de panthéisme, et qui cherche pour sa parure les plus magnifiques tissus de l’Orient, n’était pas le vrai mot de l’auteur. Prométhée suivit Ahasvérus. Ce nouveau poème, moins riche d’imagination, est supérieur de pensée. Ce n’est