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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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31 mars 1842.


La situation politique de la Syrie devient de plus en plus compliquée et difficile. La Porte, humiliée de la protection hautaine et tracassière de l’étranger, éprouve des velléités d’indépendance, et, après avoir appelé à son aide les armes des chrétiens pour arracher la Syrie à un enfant de Mahomet, voudrait aujourd’hui secouer le joug de ses redoutables alliés. Elle ne sait donc pas que, lorsqu’un état s’est trouvé dans la douloureuse nécessité de se livrer à la tutelle armée de l’étranger, il a tout perdu ? La force matérielle et la puissance morale lui manquent également ; ses efforts impuissans ne font illusion à personne, nul ne les prend au sérieux. Il est des abaissemens dont on ne se relève jamais. Dans cette irréparable décadence, une résignation prudente et mesurée est le seul moyen de prolonger une existence qui, dépourvue de grandeur et de dignité, peut cependant avoir encore quelque durée. Le divan ne sonde pas dans toute leur profondeur les plaies de l’empire qu’il gouverne. Il prend pour des accidens fâcheux, mais passagers, les symptômes d’une dissolution qui, pour être lente, n’est pas moins progressive et certaine. Par ses imprudences, il aggrave la situation de l’empire, il en multiplie les dangers, il rapproche le jour de la catastrophe.

Singulière pensée que de vouloir imposer un gouverneur turc aux chrétiens de la Syrie lorsque cette province vient d’être rendue à la Porte par des troupes européennes et par le soulèvement des populations chrétiennes contre Méhémet-Ali !

Au surplus, les affaires d’Orient paraissent devoir porter le trouble dans les esprits les plus fermes et fausser les jugemens des hommes les plus éclairés. Que de mesures imprudentes, que de vaines prévisions depuis deux ans ! Qui