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REVUE DRAMATIQUE.

LES RESSOURCES DE QUINOLA.

En vérité, c’est avec regret et douleur que j’écris cette page de notre histoire littéraire, et pourtant les faits ne me manqueraient pas pour la rendre vivante et curieuse. Jamais le nom d’artiste n’a été plus prodigué qu’à notre époque, jamais on n’a fait un plus bruyant étalage de tous les sentimens d’honneur, d’élévation, de désintéressement et de franchise, qu’un pareil nom doit comporter. Dans ces temps de doute et de déception, l’art est pour nous une parole magique, un mot de ralliement et d’espérance qui me rappelle, par les sympathies qu’il éveille, par les enthousiasmes qu’il excite, le grand mot si passionnément aimé, si mal compris de Jean-Jacques et de son siècle, le mot de vertu. Julie, Saint-Preux, Volmar, s’écrient : « Vertu ! vertu ! » à chaque page de la Nouvelle Héloïse ; il n’est pas un livre aujourd’hui où l’on ne parle sans cesse de l’art ; poètes, romanciers, critiques, tout le monde fait sonner ce beau nom. Eh bien ! il en est parmi nous qui s’efforcent de rendre cette religion aussi mensongère que l’a été celle du XVIIIe siècle. Le XVIIIe siècle était débauché : les élans vers la vertu se tournaient chez les écrivains en transports et en tendresses d’homme ivre aux soupers de Mlle Quinaut. Notre siècle est industriel : les élans vers l’art se tourneront, si on n’y