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REVUE DES DEUX MONDES.

Où Kaïdha mirait son visage de femme,
Comme un rayon sortant des ombres d’un ciel noir !


Tu pends par la poignée au pilier d’une tente,
Avec mon narghilé, ma selle, et mon fusil,
Et semblable à mon cœur, qui s’use dans l’attente,
La rouille et le repos te dévorent le fil !


Et toi, mon fier Sultan, à la crinière noire,
Coursier né des amours de la foudre et du vent,
Dont quelques poils de jais tigraient la blanche moire,
Dont le sabot mordait sur le sable mouvant,


Que fais-tu maintenant, cher berceur de mes rêves ?
Mon oreille aimait tant ton pas mélodieux,
Quand la bruyante mer, dont nous suivions les grèves,
Nous jetait sa fraîcheur et son écume aux yeux !


Tu rengorgeais si beau ton cou marbré de veines
Quand celle que ma main sur ta croupe élançait,
T’appelait par ton nom, et, retirant tes rênes,
Marquetait de baisers ton poil qui frémissait !


Je la livrais sans peur à ton galop sauvage :
La vague de la mer, dans le golfe dormant,
Moins amoureusement berce près du rivage
La barque abandonnée à son balancement.


Car, au plus léger cri qui gonflait sa poitrine,
Tu t’arrêtais, tournant ton bel œil vers tes flancs,