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REVUE DES DEUX MONDES.

Puis disparut légère. Ainsi qu’elle partoit,
Le Ciel tout réjoui ses louanges chantoit ;
Les Vents à son regard tenoient leurs bouches closes,
Et les petits Amours faisoient pleuvoir des roses.

Olympe s’éveille et n’a plus qu’à obéir. Vénus lui a également permis de conduire avec elle Camille, sa compagne, qui doit combler les vœux d’un certain Floridant ; mais Olympe va plus loin, elle songe de son propre conseil à mettre la jeune Fleur-de-Lys de la partie, et sans le lui dire ; car Fleur-de-Lys est éprise du gracieux Nirée, et Olympe, en ce jour de fête, veut faire le bonheur de son amie comme le sien.

Tout se passe à ravir, et au gré de la déesse ; les couples heureux se rencontrent ; mais seule la jeune Fleur-de-Lys s’étonne et résiste ; elle blâme la téméraire Olympe, laquelle sait bien alors lui rappeler les anciens conseils, et lui rendre malicieusement la leçon à son tour :

Hé quoi, lui disoit-elle, où est votre assurance ?
Où sont tous ces propos si pleins de véhémence
Que vous me souliez dire afin de m’enflammer,
Avant que deux beaux yeux m’eussent forcé d’aimer ?
..................
Comme un soldat craintif, qui, bien loin du danger,
Ne bruit que de combats, de forcer, d’assiéger,
Parle haut des couards, leur lâcheté reproche,
Puis fuit honteusement quand l’ennemi s’approche ;
Vous fuyez tout ainsi, d’un cœur lâche et peureux,
Bien que votre ennemi ne soit pas rigoureux.

Si l’on n’était en matière si profane, j’allais dire que c’est en petit la situation de Polyeucte et de Néarque quand celui-ci, après avoir poussé son ami, recule. Mais la sage Fleur-de-Lys tient bon jusqu’à la fin. On se demande, à voir cette discrétion extrême et ce demi-voile jeté sur un coin du tableau, quel peut être ce gracieux et timide Nirée, compagnon d’Eurylas. Est-ce le duc de Guise, se dit Du Radier ? est-ce Du Guast ? est-ce Chanvallon ? Et moi je demande bien bas : Ne serait-ce pas Desportes lui-même, le discret poète, qui fait ici le modeste et n’a garde de trahir l’honneur de sa dame ?

Cette élégie finit par quelques traits charmans pour peindre les délices mutuelles dans cette rencontre :

Ô jeune enfant Amour, le seul dieu des liesses,
Toi seul pourrois conter leurs mignardes caresses… ;