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chalet bâti en amphithéâtre derrière la maison, ou sur la tour, à l’ombre du pommier. Puis, tandis que le repas se prolonge, des hôtes nouveaux arrivent : le corbeau familier, qui descend d’un arbre et vient réclamer sa nourriture, la cigogne, qui mord sans pitié la main généreuse dont elle reçoit le pain, ce qui faisait dire à Kerner que cet oiseau a perdu son paradis comme l’homme, car il est ingrat comme lui.

La bibliothèque de la tour contient, entre autres monumens précieux, le manuscrit autographe des poésies d’Uhland, envoyées successivement et par lettres aux jours de leur éclosion. Puis ce sont des volumes sans nombre renfermant des actes scientifiques, d’épais in-folios remplis de pièces à l’appui de certains faits magnétiques, la démonologie coudoyant la littérature. Fouillez ces archives étranges, consultez ces annales d’un autre monde, ces parchemins presque cabalistiques, et vous serez épouvanté en face des révélations qui en émanent ; plus tard, si vous en êtes digne, s’il vous juge suffisamment initié pour prendre à la chose un intérêt sérieux, le secrétaire intime de la visionnaire de Prevorst vous conduira dans quelque sanctuaire retiré, où languissent en charte privée, dans une vie incertaine et comme flottante entre l’extase et le sommeil, de ces êtres d’une susceptibilité nerveuse toujours voisine du délire, sensitives humaines qui se crispent et rendent des oracles au souffle du trépied. Là vous assisterez à des phénomènes singuliers, effrayans parfois, souvent aussi plaisans et comiques. Il y a quelques années, Kerner avait chez lui une possédée qu’il traitait. Cette femme, à l’état ordinaire parfaitement raisonnable, d’un naturel décent et réservé, donnait, pendant la période de ses crises, les véritables symptômes de la convulsion démoniaque. Contraction subite de la face en horribles grimaces, évolutions spasmodiques, propos tumultueux, menaçans, obscènes, effrénés, où perçaient par momens une saillie drolatique, un bon mot : tels étaient les signes accoutumés par lesquels se trahissaient ces attaques de catalepsie, qui la prenaient, du reste, à l’improviste, au milieu des soins du ménage ou des travaux d’aiguille et de rouet. Kerner, esprit religieux, chrétien, tout en gardant la conviction profonde qu’il réside chez les gens de cette espèce un mauvais démon sur lequel on peut agir au nom du Christ, n’en saisit pas moins le côté comique de ces hallucinations, et ne se fait pas faute de s’en divertir. Avec la possédée se trouvait, dans la maison du docteur, un vieux domestique, atteint autrefois de folie, et qu’une certaine exalta-