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SOUVENIRS DE LA JEUNESSE DE NAPOLÉON.

léon signé par Louis XVI, et qui porte la date du 30 août mil sept cent quatre-vingt-douze[1] ! Le roi, avant de tomber, semble avoir voulu nommer son successeur.

La correspondance se compose d’un assez grand nombre de lettres adressées à Napoléon par le général Paoli, par le père Dupuy, minime, par Saliceti, par le ministre de la guerre Lajard. On connaît l’histoire de Paoli : devenu, en 1765, premier magistrat et général en chef des Corses, non-seulement il résista pendant quinze ans aux Génois et aux troupes que Louis XV avait mises à leur disposition, mais il sut captiver l’intérêt de toute l’Europe par la sagesse et la modération de son administration. Paoli essaya de policer la Corse : il protégea le commerce, il fit des traités avec les puissances barbaresques, il créa une marine ; enfin, au milieu d’une des luttes les plus acharnées dont l’histoire ait conservé le souvenir, il s’occupa de l’instruction publique, et créa une université. Son nom fut honoré partout, et à une époque où les principes de liberté étaient prêchés par tous les écrivains, on se passionna pour un petit peuple qui, chose rare, savait à la fois défendre avec énergie son indépendance et respecter ses lois. Ce fut alors que Rousseau fit sur la Corse sa prophétie si connue et qui devait bientôt s’accomplir.

L’intérêt que les philosophes montraient pour un peuple si vaillant lui fut fatal, et l’on assure que ce fut là le principal motif qui porta Louis XV à vouloir l’asservir. Gênes, qui ne possédait pas la Corse, vendit cette île à la France. Paoli hésitait à continuer une lutte devenue si inégale ; mais le peuple indigné courut aux armes, et l’Europe vit avec admiration une poignée de montagnards résister courageusement aux armées d’une grande nation. Le lieutenant-général Chauvelin, qui avait débarqué dans l’île avec douze mille hommes, fut battu dans toutes les rencontres, et forcé de se renfermer dans les places fortes. La Corse, qui devançait ainsi la grande lutte de l’indépendance américaine, aurait été délivrée si, comme l’Amérique, elle avait trouvé de puissans auxiliaires ; mais l’on fit des vœux stériles, et personne ne se montra. Le maréchal de Vaux, à la tête de trente mille hommes, pénétra dans les cantons les plus inaccessibles de l’île, et Paoli, écrasé à Golo, dut chercher un asile en Angleterre ; il s’y rendit en traversant le continent, et fut accueilli

  1. Dans ce brevet, il est dit que la nomination de Napoléon comptera à partir du 6 février 1792 : c’est là ce qui a fait supposer à tort que le brevet devait être daté du même jour.