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LETTRES DE CHINE.

le gouvernement chinois. Enfin, en janvier, le commissaire Lin, qui a joué un si grand rôle dans cette immense affaire, partit de Pékin pour purger la terre céleste du fléau qui la désole. Voici les termes de l’édit qui lui donne cette importante mission.

« L’édit fulminant qui suit a été reçu du département de la guerre.

« Taoukwang,18me anniversaire, 11me lune, 16me jour (31 décembre 1838).

— J’ordonne à Lin Tsihtseuen, gouverneur d’Hong-kwang, de se rendre en toute hâte à Canton, d’examiner et de diriger les affaires des ports de mer de cette province. Je lui confie le pouvoir et le sceau d’un envoyé impérial. L’amiral de ladite province et les subordonnés se placeront sous ses ordres. »

Le même jour, une dépêche du conseil privé fut reçue par Tang, le gouverneur, et par E, le sous-gouverneur ; elle était conçue en ces termes :

« Le dix-huitième jour de la onzième lune, 3 janvier 1839, l’ordre impérial suivant a été reçu :

« Moi, l’empereur, considérant l’accroissement journalier de cette drogue insinuante, l’opium, et l’augmentation effrayante de l’exportation de l’argent sycee, j’ai spécialement nommé Lin Tsihtseuen gouverneur d’Hong-kwang, pour qu’il ait à se rendre en toute hâte à Canton, afin d’examiner et diriger les affaires des ports de mer, etc.

« Ledit gouverneur (Tang), lorsqu’il aura reçu ces ordres, doit balayer et laver cette ordure, et, en faisant des efforts réitérés, examiner et agir conformément aux anciennes lois. Il ne faut pas qu’il espère qu’il pourra se décharger de cette affaire, et qu’il se garde bien surtout de rester tranquille et de regarder.

« Cet abominable trafic doit cesser. Les affaires publiques et la paix de mon esprit exigent son interruption. Ledit gouverneur administre les terres des deux yue ; les devoirs de son gouvernement sont multipliés, et je crains qu’il ne puisse tourner tous les efforts de son esprit vers la question de l’opium. C’est pourquoi j’ai spécialement et exclusivement député Lin à Canton pour la conduite de cette affaire, afin qu’il puisse couper le mal dans sa racine, et faire disparaître les souffrances qui affligent mon peuple, etc. »

Après avoir reçu cette dépêche, Tang publia une proclamation aux étrangers, dans laquelle il leur rappelle toutes les faveurs passées de la céleste dynastie. « Notre empire de Chine, dit-il, n’a pas le moindre besoin de commercer avec vous ; mais, vous, pourriez-vous exister un seul jour, s’il ne vous était plus permis de commercer avec nous ? Dans d’autres occasions, les édits se sont succédés sans interruption. Nous, le gouverneur et le fooyuen, nous vous avons trois fois et cinq fois, de nouveau et de nouveau, avertis et exhortés ; mais, parce que votre esprit est absorbé par l’amour du gain, nos paroles ont été pour vous comme du vent. » Ici le gouverneur de Canton cite les édits anciens, et appelle l’attention sur les édits nouveaux ; il énumère toutes les mesures prises ; il fait une terrible peinture des châtimens qui ont atteint les coupables et qui attendent ceux qui persévèrent dans la voie du crime ; il recommande, dans les termes les plus énergiques, aux étrangers de