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ÉTUDES SUR L’ALLEMAGNE.

ries représentatives à priori, telles qu’elles ont été appliquées en France, et leur oppose un système d’états provinciaux ayant ses racines dans l’ancien droit allemand et tendant à faire revivre, autant que le comporte la différence des temps, les libertés aristocratiques, bourgeoises et même ecclésiastiques du moyen-âge. Ce sont des idées de ce genre qui poussent ce prince à élargir la sphère d’activité des diètes provinciales et à les appeler à un rôle beaucoup plus important que celui qu’elles ont joué jusqu’ici. Mais l’influence de ces assemblées ne peut grandir et s’étendre qu’aux dépens de la centralisation administrative, de l’absolutisme militaire et bureaucratique, de toutes les traditions et les habitudes du gouvernement prussien. Elles peuvent facilement offrir un point d’appui à la nationalité polonaise qu’on voudrait éteindre, à la liberté de l’église catholique qu’on voudrait étouffer, enfin à tout ce qui ne veut pas se laisser imposer le joug d’une unité artificielle et oppressive, et leur opposition déconcerterait bien des plans conçus avec amour et poursuivis avec persévérance depuis longues années. Or, comme une résistance de cette nature est tout ce que redoute le plus la haute administration prussienne, il est probable que les idées du roi sur le développement à donner aux libertés provinciales trouveront toujours une opposition plus ou moins ouverte parmi les hommes qui l’entourent, et qu’à moins qu’il ne soit doué d’une force de caractère peu commune, on l’amènera insensiblement à abandonner celles de ses vues personnelles qui seraient incompatibles avec le maintien des traditions antérieures du cabinet de Berlin. D’un autre côté, si les choses restent telles qu’elles sont, si la mauvaise volonté des conseillers de la couronne parvient à paralyser l’action des assemblées provinciales et à les replacer dans la situation subalterne d’où on avait semblé vouloir les tirer, la confiance qu’inspirent encore les intentions royales s’évanouira : on verra se grossir considérablement le nombre de ceux qui demandent une représentation générale de la nation, et il pourra se présenter telles circonstances qui rendent très dangereux de la refuser. Ce simple exposé de la situation suffit pour faire voir quels embarras prépare dans l’avenir au gouvernement prussien le désir de vie politique qui a commencé à se produire sous diverses formes, et qui paraît assez sérieux et assez général pour qu’il soit désormais difficile, soit de le comprimer, soit de le tromper.

Mais cela même est peu de chose auprès des difficultés soulevées sur le terrain des questions religieuses depuis que l’emprisonnement de l’archevêque de Cologne a ranimé entre les protestans et les catho-