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dispose tout pour que le bon plaisir royal ne puisse trouver nulle part de barrières ni de résistances sérieuses[1]. Beaucoup de protestations se sont élevées contre la nouvelle constitution dans le sein des assemblées provinciales et des conseils municipaux, et le premier essai qui en a été pratiqué n’a pas répondu aux espérances du roi Ernest ; car les élections, quoique faites suivant les formes établies par sa loi électorale, ont donné dans la seconde chambre une majorité opposée au gouvernement. Cette assemblée, malgré le principe de l’irresponsabilité ministérielle, a commencé par déclarer que les conseillers de la couronne ne possédaient pas la confiance du pays, et, dans son adresse en réponse au discours du trône, elle a inséré le paragraphe suivant : « Un petit nombre seulement des sujets de votre majesté est convaincu que la constitution de 1833 a été légalement abrogée. D’après l’opinion générale, une assemblée élue suivant les règles posées par cette constitution, et donnant son assentiment aux projets de loi présentés par le souverain, peut seule garantir la tranquillité du pays. Le Hanovre ne sera heureux que lorsque cette tranquillité sera assurée. » Le roi a répondu à cette adresse par une ordonnance de dissolution rendue le 30 juin 1841, et où il déclare que les impôts votés dans la dernière session continueront d’être perçus pendant une année. Voilà où en est cette lutte qui, comme on le voit, est bien loin d’être terminée, et dont la persistance est certainement un symptôme menaçant pour la tranquillité future de la monarchie hanovrienne : « car s’il est vrai, comme le disent les vieilles maximes de la science politique, que les constitutions ne puissent être maintenues qu’à l’aide des moyens auxquels elles ont dû leur naissance, l’histoire de l’origine de la constitution de 1840 fait prévoir un triste avenir où le peuple sera en contradiction avec le gouvernement, où celui-ci ne pourra triompher qu’en employant la force et la ruse, et

  1. La loi électorale qui y est annexée, et qui n’a été promulguée qu’un peu plus tard, a cela de particulier, que, comme le dit un écrivain allemand, elle semble avoir été dictée par l’opposition, en ce sens que le législateur a pris note de tout ce qu’ont fait les opposans, afin de s’affermir d’avance contre leurs tentatives à venir. Ainsi on a vu la majorité des électeurs refuser de voter : trois voix suffiront dorénavant pour élire valablement un député. Des corps électoraux, en s’abstenant d’exercer leurs droits, ont empêché la chambre d’être en nombre suffisant : à l’avenir, la présence de trente députés rendra la chambre capable de délibérer. Certains colléges n’ont donné leurs votes qu’en faisant des réserves en faveur de la constitution de 1833, ou ont enjoint à leurs mandataires de protester contre l’abolition de cette charte : la nouvelle loi interdit aux électeurs tout autre acte que le vote pur et simple.