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bâtimens, osa traverser toute la flotte anglaise, qui lui barrait l’entrée de la baie de Naples, et parvint à entrer dans le port, après s’être battu, deux jours entiers un contre dix. On dit, il est vrai, que le roi a l’intention de s’occuper davantage de la marine à l’avenir. Mais, tant qu’il conservera son armée de terre sur un pied si coûteux, il est à craindre qu’il ne puisse pas faire des sacrifices suffisans pour son escadre ; ce n’est pas tout d’ailleurs que d’établir des chantiers et de construire, des bâtimens, il faut des marins, et les marins ne sont formés, comme on sait, pour la marine de guerre que par la marine marchande. Or la constitution économique du pays est très défavorable aux échanges avec les nations étrangères, et conséquemment au commerce maritime. Et ceci me ramène à la seconde observation que j’ai cru devoir faire sur la direction du gouvernement napolitain. Les deux erreurs se tiennent, et pour toutes deux le remède est le même, c’est l’adoption d’un meilleur système de douanes, qui aurait le double résultat d’accroître dans une proportion considérable la richesse du pays, et de fonder sur le développement de sa marine sa puissance extérieure.

Ce n’est pas que la navigation n’ait fait à Naples les mêmes progrès que les autres branches de l’activité publique ; elle a marché très vite, au contraire, depuis quarante ans. Avant la révolution, le pavillon sarde et le pavillon français avaient à peu près le monopole des transports pour Naples. La principale cause de cet anéantissement de la marine napolitaine était dans la faiblesse du pays, qui n’avait pas pu défendre son pavillon contre les courses des pirates barbaresques. Le roi Ferdinand Ier fit un traité avec les régences d’Afrique, et consentit à leur payer un tribut annuel, traité honteux et qui n’est plus exécuté, mais qui eut du moins le mérite de rendre la mer libre. D’autres mesures furent prises ensuite pour exclure en quelque sorte les pavillons étrangers des ports napolitains, et réserver au pavillon national la totalité des transports. L’ensemble de ces dispositions a donné en peu d’années un essor rapide à la navigation ; elle s’est élevée progressivement au décuple de ce qu’elle était il y a quarante ans, et les deux tiers au moins de son mouvement total s’accomplissent dans le seul port de Naples. Les pavillons étrangers ont en même temps à peu près disparu.

Mais le commerce extérieur entre pour peu de chose dans ce développement de la marine. Sur quarante-cinq mille marins, M. Serristori estime que trente-six mille sont employés à la pêche et au cabotage, et neuf mille seulement au commerce extérieur. Or, on peut présumer que le cabotage a maintenant produit à peu près tout ce