Page:Revue des Deux Mondes - 1842 - tome 29.djvu/611

Cette page a été validée par deux contributeurs.
601
LE ROYAUME DE NAPLES.

Paësiello et de Cimarosa, n’aura pas besoin d’être excitée pour produire. En attendant, à l’époque des jouissances raffinées et des luttes ardentes paraît avoir succédé l’ère des améliorations paisibles et des travaux utiles. À chaque jour son œuvre propre et son caractère distinctif.

Tout nous ramène donc à cette physionomie nouvelle de Naples, qui est si différente de celle d’autrefois. On n’y retrouve plus ni le même éclat, ni les mêmes misères. Tout est changé. Je suis entré dans des détails peut-être fatigans, pour montrer à quel point la métamorphose est complète dans la société et dans l’administration. Nulle part en Europe, si ce n’est peut-être en Belgique, il n’existe rien de pareil hors de France. Tous les jours des décrets nouveaux achèvent l’œuvre de ces quarante ans. Une mesure récente vient d’établir un système uniforme des poids et mesures. Des citoyens se sont réunis pour établir dans la capitale une salle d’asile. Une salle d’asile à Naples ! Quel désespoir pour les partisans exclusifs du vieux pittoresque ! Une compagnie s’est formée pour établir un chemin de fer de Naples à Castellamare, et les pêcheurs du port voient tous les jours passer et repasser devant eux la civilisation nouvelle sous sa forme la plus ardente et la plus neuve, une locomotive : seul point de l’Italie où ce spectacle soit donné. De nombreux bateaux à vapeur, autres messagers d’un avenir inconnu, rapprochent le monde entier de cette cité qui restait si seule autrefois sur sa baie inutile, et c’est encore la France qui les envoie pour la plupart. Que résultera-t-il de tout ce travail ? Quels fruits nouveaux portera sur cette terre presque vierge, sous ce ciel brillant, l’alliance des idées et des procédés modernes avec le génie italique, si fécond et si spontané ? La moisson devra être belle un jour, car tout la favorise.

Il y a cependant, dans la direction actuelle du gouvernement napolitain, deux préoccupations dominantes qui ne me paraissent pas aussi bien entendues que les autres pour le bien du pays. L’une est le goût passionné du roi pour un état militaire considérable ; l’autre est la protection exagérée dont il couvre certaines manufactures, aux dépens de l’agriculture, du commerce, de la navigation et de tout l’ensemble de la richesse nationale.

La révolution française a introduit la conscription dans le royaume de Naples. L’armée s’y recrute absolument comme chez nous. Son effectif est, sur pied de paix, d’environ quarante mille hommes, dont vingt-cinq mille d’infanterie, quatre mille de cavalerie, trois mille d’artillerie et de génie, et huit mille de gendarmerie. En temps de