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thèques royales sont ouvertes tous les jours au public. Quant au musée des Studj, je n’ai pas besoin de dire que c’est une des plus curieuses collections qui existent. Toute l’Europe connaît ce dépôt unique au monde des richesses que les fouilles d’Herculanum et de Pompéi ont mises au jour. Par une singularité étrange, l’archéologie est peu cultivée à Naples, malgré les moyens admirables que cette science y aurait en quelque sorte sous la main. Les savans et les artistes de tous les pays ont tiré plus de parti que les Napolitains de ces découvertes. On a même remarqué que, depuis l’administration française, les fouilles sont conduites avec une lenteur qui a quelque chose de systématique. Quels que puissent être les motifs de cette absence de zèle, le roi de Naples fait très libéralement les honneurs de ce qu’il possède, et le musée des Studj est le plus accessible en même temps que le plus intéressant des musées.

De toutes les grandes villes d’Italie, Naples est celle où les arts du dessin ont jeté le moins d’éclat, quoiqu’elle ne soit pas dénuée de souvenirs sous ce rapport. Les monumens d’architecture y sont peu nombreux ; elle possède cependant quelques palais et quelques églises qui attestent au moins le désir de bien faire, et il n’y a rien en Italie de plus magnifique que la fameuse chartreuse royale de Saint-Martin, où toutes les merveilles des arts ont été appelées à embellir encore une des plus admirables situations de l’univers. L’arc de triomphe d’Alphonse d’Aragon au château neuf est aussi un beau monument de la renaissance ; le dessin original de cette porte, et l’élégance des bas-reliefs qui la décorent, montrent quel était l’état de la statuaire à Naples vers le milieu du XVe siècle. Mais c’est surtout dans la peinture que Naples a essayé de soutenir la rivalité avec ses sœurs privilégiées. Dès le temps de Giotto, elle avait déjà des artistes. Plus tard, André de Salerne y importa le goût et la manière de Raphaël, avec moins de perfection sans doute, mais avec non moins de douceur et de pureté. Lors de l’invasion générale des imitateurs de Michel-Ange en Italie, l’école napolitaine suivit le mouvement, et produisit autant de peintres qu’une autre dans cette mauvaise voie.

Aujourd’hui encore le gouvernement napolitain fait tout ce qu’il peut pour développer les arts. Il entretient à Rome six pensionnaires : deux peintres, deux sculpteurs et deux architectes, à la manière de la fameuse Académie de France fondée par Louis XIV. Par un bonheur particulier, ces pensionnaires sont établis au palais Farnèse, célèbre par la grande galerie d’Annibal Carrache, chef-d’œuvre de