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inquiétude un acte qui tendait à établir que les engagemens les plus solennels des souverains ne liaient en rien leurs successeurs, et on s’alarma de ce qu’un pareil précédent, une fois admis, avait de dangereux pour l’avenir des constitutions existantes. Quant aux Hanovriens, ils furent profondément blessés de voir ainsi effacer d’un trait de plume des institutions pour lesquelles ils professaient un vif attachement ; l’irritation fut grande, surtout dans la classe moyenne, à laquelle la charte de 1833 assurait des droits politiques assez étendus, et qui a opposé jusqu’ici aux actes du gouvernement une résistance passive que rien n’a pu vaincre. Le mécontentement se manifesta d’abord par la protestation devenue célèbre de sept professeurs de l’université de Gœttingue, lesquels déclarèrent qu’ils se croyaient toujours liés par le serment prêté à la loi fondamentale, qu’ils ne regarderaient pas comme légitime une assemblée d’états élue à d’autres conditions que celles qui étaient fixées par cette loi, et qu’ils ne pouvaient en conscience donner leurs voix pour l’élection d’un député de l’université à une telle assemblée. On leur répondit par une destitution avec l’ordre de quitter immédiatement le Hanovre[1] ; mais leur départ ressembla à un triomphe, et l’opinion publique se déclara d’autant plus vivement en leur faveur, que quelques-uns d’entre eux étaient au nombre des plus illustres savans de l’Allemagne. À la protestation des sept professeurs vinrent bientôt se joindre celles de plusieurs conseils municipaux qui ne voulurent prêter foi et hommage au roi qu’en faisant des réserves en faveur de la constitution de 1833 et du serment qui les liait envers elle. La lutte, étant ainsi engagée, n’a pas cessé depuis ce temps, et chaque année y a ajouté quelques incidens nouveaux. En 1838, le roi ayant convoqué les états suivant les formes de la loi de 1819, la seconde chambre ne se trouva pas en nombre suffisant pour délibérer, parce que beaucoup de colléges électoraux refusèrent de voter ou enjoignirent à leurs mandataires de faire des réserves en faveur de la charte supprimée. La même chose arriva en 1839, et on ne put compléter la chambre qu’en dé-

    droit public actuel de l’Allemagne, où les agnats sont purement et simplement les premiers sujets du chef de leur famille. D’ailleurs, les agnats de la maison de Hanovre n’avaient pas réclamé, et le duc de Cumberland, qui prétend n’avoir pas accepté la constitution, n’avait jamais fait de protestation publique, ni auprès du roi, ni auprès des états, ni auprès de la diète germanique. Il avait même accepté positivement la portion de la loi fondamentale qui avait rapport aux apanages. Quelle valeur peut avoir une protestation qui, si elle existe, n’est jamais venue à la connaissance de personne ?

  1. Un seul d’entre eux était Hanovrien de naissance.