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ÉTUDES SUR L’ALLEMAGNE.

grande partie le contraste existant entre ces états et les deux grandes puissances, et ramené à une certaine unité l’ensemble de la confédération germanique. Quoique les résolutions de l’assemblée fédérale aient rencontré peu de résistance, il ne faut pas en conclure qu’elles aient été acceptées par les populations comme le droit public définitif de l’Allemagne. Sans parler du parti révolutionnaire, dont il est assez difficile d’apprécier la force réelle, il existe toujours, surtout dans les pays du midi, un parti constitutionnel nombreux et important qui n’a pas perdu l’espoir de recouvrer les libertés enlevées par les décrets de Francfort, et qui n’attend que des circonstances favorables pour essayer de les reconquérir. Quelques restrictions qu’on ait apportées au pouvoir des chambres représentatives, à la liberté et à la publicité de leurs discussions, elles n’en sont pas moins, là où elles existent, des foyers d’opposition plus ou moins patente, et elles manquent rarement une occasion de protester au moins indirectement contre la position subalterne qui leur a été faite. Les idées libérales ont été comprimées et réduites momentanément à l’impuissance, mais on ne peut pas les considérer comme chassées des esprits, ni même comme ayant perdu de leur empire sur eux, ainsi qu’il est arrivé dans d’autres pays à la suite d’expériences peu satisfaisantes. Et il ne faut pas croire que leur influence soit contrebalancée en Allemagne par un grand fonds d’attachement héréditaire aux vieilles institutions ou de dévouement aux dynasties. D’abord on ne peut pas dire qu’il existe réellement de vieilles institutions dans un pays qui a été bouleversé tant de fois depuis cinquante ans et dont l’organisation politique date de 1815. Quant aux souverains, s’il est vrai que quelques restes de l’antique fidélité se soient conservés dans celles de leurs provinces qu’ils ont reçues en héritage de leurs ancêtres, il ne faut pas oublier que presque tous sont, pour une grande partie de leurs sujets, des maîtres nouveaux, sans racines dans le passé, imposés par l’épée de Napoléon ou par les protocoles du congrès de Vienne. Telle est la situation des princes allemands vis-à-vis de leurs acquisitions de 1802, de 1806 et de 1815, toutes composées d’évêchés, d’abbayes, de villes libres, de petites principautés, débris fort peu homogènes du vieil empire germanique, dont l’assimilation avec les pays auxquels on les a annexés est bien loin d’être complète, et qui ne sont point attachés aux dynasties que les convenances politiques leur ont données par ces liens puissans que forment les siècles. Tous ces anciens pays d’église, et d’empire, dont la Prusse, la Bavière, le Wurtemberg, Bade, Darmstadt, ont reçu une si forte